La bataille des voyageuses, Multistrada 1260 contre Tiger 1200

Publié le 6 septembre 2018 par Jérôme Ducret.

Photos: André Lehmann.

Comparo enduros voyage 1000

La bataille des voyageuses, Multistrada 1260 contre Tiger 1200

Deux baroudeuses routières européennes à l’épreuve du quotidien, des petites routes et des déplacements rapides en Suisse. D’un côté l’italienne agile et puissante, de l’autre la britannique classe polyvalente.

Ce sont les deux maxi-enduros de voyage qui ont eu droit à des modifications conséquentes pour 2018. Nous les avons donc comparées l’une à l’autre, Multistrada 1260 contre Tiger 1200. La première, fleuron de la marque italienne Ducati, est à l’origine une sorte de superbike transformée en trail, avec (dans cette version) des roues de 17 pouces à l’avant et à l’arrière. La seconde utilise un moteur dérivant de la maxi-naked sportive de la marque Triumph, adapté dans une cylindrée plus grande sur un maxi-trail doté d’une roue avant de 19 pouces et avec une transmission à cardan.

Les deux marques nous ont prêté durant près de deux semaines des exemplaires de ces nouvelles moto, à tester sur les routes de Suisse, sans les valises. En version S pour la Ducati, ce qui veut dire avec les suspensions pilotées par électronique et semi-actives, plus l’écran couleur TFT. Et en version XRt pour la Triumph, la plus équipée pour le voyage, nantie de jantes à bâtons.

Notre parcours de test a compris des kilomètres de ville, des voies rapides sur plusieurs centaines de kilomètres, et de petites routes dans le massif du Gantrisch et les parages du Gurnigelpass, dans le canton de Berne.

Dans ce contexte global, toutes deux se sont montrées confortables, avec cependant des assises hautes et une taille imposante. Des deux, la Ducati est la plus facile à manoeuvrer à l’arrêt. Cela tient à son large guidon, à son poids un rien inférieur et à la géométrie générale de la moto, proche de celle d’un supermotard – sans rire.

Multistrada 1260 contre Tiger 1200
Le tableau de bord de la Ducati, en version S.

La Triumph se montre en revanche un peu plus accueillante quand on enquille kilomètre après kilomètre. Elle offre par exemple une meilleure protection contre le vent et la pluie. Et plus d’équipements de série, comme une selle chauffante ou un pare-brise dont on ajuste la hauteur grâce à un petit moteur électrique.

 

Multistrada 1260 contre Tiger 1200
Le cockpit de la Triumph Tiger.

Pour les deux, la prise en main est intuitive. Les tableaux de bord en couleur (Ducati nous a prêté une 1260 S) sont clairs, faciles à comprendre, et regorgent d’informations si on va les chercher. Les commandes sont bien placées. Pour naviguer dans les menus de l’écran comme pour sélectionner tel ou tel réglage de la moto, tout se fait via le comodo gauche, tant sur la Triumph que sur la Ducati. L’anglaise propose une sorte de joystick qui se bouge sur quatre axes, tandis que l’italienne est plus classique et a un basculeur doublé d’un second bouton.

Pléthore d’aides et de gadgets électroniques

Si l’on s’attarde sur les aides électroniques présentes à bord, cela ressemble à un catalogue d’électronique de loisirs, ou presque. On a des modes de pilotage, des contrôles de traction et des ABS paramétrables sensibles à l’angle d’inclinaison de la bécane, des clignotants à rappel automatique … sans oublier des suspensions électroniques semi-actives. Elles s’adaptent en temps réel aux conditions de roulage, et au mode de pilotage choisi. On peut également les ajuster soi-même, avec les boutons du comodo, par exemple pour régler la précharge si l’on emporte des bagages, ou pour obtenir un réglage de base ferme ou souple.

Multistrada 1260 contre Tiger 1200
Tout se commande depuis ici sur la Ducati.

Ces suspensions électroniques, de marques différentes, travaillent bien et lissent les réactions des motos. Malgré les grands débattements de suspension, on a peu la fourche qui plonge au freinage ou la roue arrière qui se tasse à l’accélération. Et bosses et trous sont avalés avec sérénité, même à bonne vitesse.

Multistrada 1260 contre Tiger 1200
Et de même sur la Triumph. Notez le petit joystick à côté du klaxon…

Côté freins, tout va bien, le mordant nécessaire à une conduite sportive est là si on le cherche, mais on peut aussi faire les choses avec calme, et même le frein arrière de la Ducati est utile – on n’a pas vraiment l’habitude. On peut aussi serrer les disques avant en plein virage sur la Multi comme sur la Tiger sans provoquer de moment de redressement gênant de la moto.

La vraie différence entre cette anglaise et cette italienne se fait au niveau des moteurs et de la position de conduite. En résumé, on dira que la Ducati se montre plus sportive, et la Triumph plus voyageuse et plus souple.

On rappelle que le gros twin en L de la Multistrada 1260 est équipé d’une distribution variable, le système DVT, qui fait que l’angle d’ouverture simultané des soupapes n’est pas fixe mais varie en fonction de divers paramètres. Un moyen pour rendre le gros bicylindre plus souple à bas régime et pour dégager de l’accélération un peu partout, sans amputer la partie haute du compte-tours. Eh bien malgré le DVT, la Multi ne peut pas rivaliser avec la Tiger 1200 en termes de souplesse à bas régime. Le triple anglais est plein et onctueux, il prend des tours comme dans du beurre, sans avoir le côté parfois encore un peu brusque du twin made in Bologne. Il est aussi moins vif bas dans les tours. Si l’on choisit un mode de pilotage doux, ces différences s’estompent, bien sûr.

Multistrada 1260 contre Tiger 1200
Un peu comme un très gros Supermotard, le confort en plus.

Il y a aussi la bande son, plus pétaradante sur la Ducati, plus pleine sur la Triumph. On signale au passage pour les connaisseurs de la marque anglaise que les célèbres sifflements mécaniques ont pour ainsi dire disparu. C’est le fruit d’un travail tout en finesse effectué sur la transmission primaire. Travail que l’on retrouve d’ailleurs sur toute la gamme tricylindre, roadsters comme enduros dites de voyage.

Multistrada 1260 contre Tiger 1200
La Tiger est stable, rapide et confortable. Ici la version XRt, avec des jantes à bâtons.

Et puis l’assise de la Multistrada semble plus fine et son guidon plus large. On tourne avec moins d’effort qu’aux commandes de la Tiger 1200. La première est plus joueuse et il suffit d’un battement de cil pour conclure une épingle ou faire demi-tour. L’Anglaise est un peu plus posée, même si ce n’est de loin pas une enclume une fois mise en mouvement. Elle paie peut-être aussi le choix d’une roue antérieure de 19 pouces, contre 17 chez sa rivale. Dix-neuf pouces, c’est bien pour l’image de baroudeuse, mais ça l’est moins pour la vivacité. Précisons que nous n’avons pas eu l’outrecuidance de tester ces motos hors asphalte, même si elles en sont toutes deux parfaitement capables et disposent chacune d’un mode de pilotage nommé Enduro, qui désactive partiellement l’ABS et autorise un certain degré de patinage de la roue arrière, avec un réglage de suspensions encore assoupli.

 

Voici l’avis de notre testeur André Lehmann

 

« La Tiger donne visuellement une impression de lourdeur, et malgré le gain de poids (près de 11 kg) par rapport au modèle 2017, il faut une certaine force pour manœuvrer la machine moteur éteint, surtout en marche arrière sur un faux-plat. Une fois installé sur la moto, on constate que la hauteur de selle est relativement élevée, même avec une selle en position basse et mes 1,83 m. Donc, il s’agit vraiment d’une bécane pour les grands. Le confort d’assise est optimal, confortable sur les longues distances. Les commandes tombent naturellement sous la main, les informations de l’écran TFT se laissent lire aisément, même par grand soleil. Et la moto dégage l’impression d’une très bonne qualité de finition, autant au niveau de la peinture que des formes bien travaillées et de l’agencement du poste de pilotage.

Multistrada 1260 contre Tiger 1200
Des flûtes pour l’échappement. Et un monobras oscillant qui laisse bien voir la belle jante arrière.

« En ville, la sensation de lourdeur s’évanouit dès les premiers tours de roue. La moto est bien équilibrée avec une masse bien centrée. Grâce à un moteur souple à bas régime et une commande d’embrayage douce, la moto peut facilement évoluer à 2-3000 tours/minute et avancer dans le trafic dense zurichois, même se faufiler entre les files de voitures. Seuls bémols: le sélecteur est dur et bruyant (mais précis, voir rubrique pour la Ducati) et le moteur chauffe en ville, faisant remonter la chaleur vers les genoux du pilote. »

Multistrada 1260 contre Tiger 1200
La Triumph adopte un cardan pour la transmission secondaire. Moins d’entretien à faire.

« Sur autoroute, tout va bien, le moteur est bien assez fourni, la protection est bonne et l’autonomie très raisonnable. On constate cependant quelques turbulences lors de passages d’autres véhicules. »

« Sur les petites routes, la moto se balance facilement dans les virages, secondée par une bonne partie-cycle. Le mode de conduite « virolos » apporte un petit plus, mais la différence n’est pas énorme comparé au mode « route ». Le moteur répond toujours présent et accélère nettement à partir de 7000 tours, tout en étant relativement linéaire (voir rubrique pour Ducati).

« Je n’ai testé la Ducati Multistrada que sur des routes de campagne. L’assise est plus profonde et plus en avant, ce qui permet de manoeuvrer la moto avec facilité dans les virages. La moto semble plus compacte, avec un sélecteur de vitesse et une pédale de freins positionnés plus en avant. La bulle protège bien le haut, mais le bas du corps est plus exposé. Les commandes sont facilement trouvées sur le guidon, bien qu’il faille s’habituer au sélecteur sur le comodo gauche. L’écran TFT est également bien lisible et bien garni en informations.

Multistrada 1260 contre Tiger 1200
Un nouveau regard (LED, nouveau design) pour 2018 chez l’anglaise.

« Le moteur, lui, est plus rauque dans les bas régimes et plus violent dans les haut régimes, excellent pour attaquer, mais moins agréable pour enrouler tranquillement. Le sélecteur est également bruyant et doté de faux points morts (entre la 3e et la 4e), comme déjà vécu sur d’autres modèles Ducati. Le passage de la 1e demande un certain temps d’adaptation.

Multistrada 1260 contre Tiger 1200
Le bec typique des Multistrada.

« Les deux motos représentent le haut de gamme de l’enduro voyageur, mais avec des styles différents. Alors que la Tiger est plus homogène dans l’ensemble des situations testées, la Multistrada semble plus typée «arsouille». Les deux engins fourmillent d’aides électroniques et de gadgets comme les sièges chauffant pour la Tiger et la connexion Bluetooth sur la Multistrada. Ces bécanes sont certainement taillées pour l’aventure, mais pour les aventuriers soucieux de leur confort. »

Fiches techniques (Comparatif)

Marque Ducati Triumph
Modèle Multistrada 1260 S Tiger 1200 XRt
Année 2018 2018
Catégorie Enduro de voyage Enduro de voyage

Moteur

Type Bicylindre en L (à 90 degrés), 4-temps, DACT, distribution desmodromique variable DVT, accélérateur électronique avec modes de pilotage Tricylindre en ligne, 4-temps, double ACT, quadrisoupape, avec accélérateur électronique et modes de pilotage
Cylindrée 1262 cm3 1215 cm3
Refroidissement Liquide Liquide
Alimentation Injection électronique Injection électronique
Alésage x course 106 mm x 71,5 mm 85 mm x 71,4 mm
Taux de compression 13 : 1 11 : 1
Echappement 2 en 1 en 2 sur le côté droit 3 en 1 en 1 sur le côté droit

Transmission

Finale Chaîne Cardan
Boîte Six vitesses Six vitesses
Embrayage Multidisque en bain d'huile assisté et anti-dribble Multidisques en bain d'huile, assisté avec amortisseur de couple

Performance

Puissance max. 158 ch (116,2 kW) à 9500 tr/min 141 ch (104 kW) à 9350 tr/min
Couple max. 129,5 Nm à 7500 tr/min 122 Nm à 7600 tr/min
Contrôle de traction Oui, accordé avec les modes de pilotage, réglable sur 8 niveaux et désactivable Oui, accordé avec les modes de pilotage, réglable sur niveaux et désactivable
Vitesse de pointe Plus de 200 km/h (selon constructeur) Plus de 200 km/h (selon constructeur)

Dimensions et poids

Empattement 1585 mm 1520 mm
Poids 212 kg à sec 243 kg à sec
Hauteur de selle 825 mm - 845 mm (ajustable) 835 mm - 855 mm (ajustable)
Angle de chasse 25 degrés 23,2 degrés
Chasse 111 mm 99,9 mm

Partie-cycle

Chassis Tubulaire en treillis d'acier Cadre tubulaire en treillis d'acier
Suspension Av Fourche télescopique Sachs, diamètre 48 mm, à réglage électronique semi-actif (compression et détente) par système Ducati Skyhook EVO Fourche inversée WP diamètre 48 mm, réglage électronique semi-actif (compression et détente)
Course AV 170 mm 190 mm
Suspension AR Monobras oscillant en aluminium et amortisseur Sachs à réglage électronique, semi-actif pour la compression et la détente (système Ducati Skyhook EVO), par bouton pour la précharge Monobras oscillant et amortisseur WP réglable électroniquement, semi-actif pour la compression et la détente, manuel pour la précharge
Débattement AR 170 mm 193 mm
Freinage Av Deus disques diamètre 330 mm, étriers radiaux Brembo Monobloc M 50, pompe radiale, ABS Bosch de virage Disques diamètre 305 mm, étriers Brembo radiaux monobloc 4 pistons, ABS déconnectable
Freinage Ar Disque diamètre 265 mm, étrier 2 pistons, ABS Bosch de virage Disque diamètre 282 mm, étrier Nissin 2 pistons, ABS déconnectable
Roue Av Jante à bâtons en Y en alliage léger, 3,5" x 17" Jante en alliage léger à 10 bâtons, 3" x 19"
Roue Ar Jante à bâtons en Y en alliage léger, 6" x 17" Jante en alliage léger à 10 bâtons, 4,5" x 17"
Pneu Av Pirelli Scorpion Trail II 120/70 R17 Metzeler Tourance Next 120/70 R19
Pneu Ar Pirelli Scorpion Trail II 190/55 R17 Metzeler Tourance Next 170/60 R17

Consommation

Annoncée 5,2 l/100 km
Réservoir 20 l

Catalogue

Coloris Rouge ou blanc
Disponibilité De suite De suite
Prix 21490 frs Dès 19750 frs
Options/Accessoires De série: modes de pilotage, Ducati Safety Pack (ABS de virage, contrôle de traction et anti-wheelie paramétrables), quickshifter bidirectionnel désactivable, rappel auto des clignotants (désactivable), prise 12 V, pare-brise réglable manuellement en roulant, commandes rétro-éclairées, tempomat adaptatif, protège-mains, démarrage sans clé avec transpondeur, béquilles latérale et centrale, feux de virage, selle ajustable en hauteur, écran couleur 5 pouces avec quatre modes d'affichage différents, montrant la vitesse, le régime moteur, la jauge d'essence, la température du moteur, l'heure, le mode choisi et ses réglages des aides électroniques au pilotage, la température de l'air, le kilométrage total, l'autonomie, deux trips avec la conso instantanée et moyenne, la vitesse moyenne, le temps écoulé...
En option/accessoire: valises rigides latérales, top-case, sacoche de réservoir avec emplacement pour un navigateur GPS, échappement sport,
De série: protège-mains, béquille centrale, échappement Arrow, poignées chauffantes, selle pilote chauffante, siège passager chauffant, feux additionnels anti-brouillard, rappel automatique des clignotants, feux de virage, tempomat adaptatif, pare-brise ajustable par bouton, boutons des comodos rétro-éclairés, quickshifter bidirectionnel, écran couleur TFT indiquant la vitesse, le régime du moteur, le kilométrage, la jauge d'essence, l'heure, la température externe, la consommation instantanée et moyenne, deux partiels, le mode de pilotage choisi... l'écran, qui a une fonction jour/nuit, dispose de modes d'affichage sélectionnables (six).
Intervalles de service Tous les 15000 km (ou 12 mois), tous les 30000 km pour les grands services

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