Dafy, Moto Axxe, Moto Good Deal… le marché romand de l’équipement moto en ébullition
Les vendeurs suisses de casques et d’habits moto réagissent de manières contrastées à l’arrivée des supermarchés français ou allemand.
Avec l’ouverture d’une boutique Moto Axxe à Carouge (GE) à la fin de l’été 2014 et d’un shop Dafy Moto à Lausanne au mois de mars 2015, c’est un nouveau modèle d’affaires qui débarque en Suisse romande. Ces deux enseignes, véritables supermarchés de l’habillement et des équipements pour les conducteurs de deux-roues, sont en effet bien connues en France, où elles sont organisées en réseau. Moto Axxe compte près de 100 points de vente, Dafy pas loin de 160. Les prix sont censés être le point fort de ces deux noms de la distribution, en raison notamment du fait que les commandes passent par une centrale d’achat, ce qui implique des rabais de gros. Mais, en Suisse, c’est plus compliqué.
« Nous nous fournissons pour l’instant en grande majorité en France, mais nous ne sommes pas fermés à l’idée de travailler avec les importateurs suisses, pour autant que, à service comparable pour nos clients, ils nous proposent des prix raisonnables », déclare Bruno Huc, coresponsable du magasin Moto Axxe de Carouge avec son collègue Jean-François Pascal. Le magasin propose des marques variées, dont Bering, Icon ou encore RPHA. Et depuis peu, Alpinestars, direct depuis la France, ce qui a aussi un coût. « Nous avons l’équivalent d’un salaire qui est utilisé pour faire l’importation, précise Bruno Huc. Si l’on pouvait faire autrement à des prix intéressants pour nos clients, ce serait bien, »
Dafy Moto Lausanne, qui propose aussi des services mécaniques simples (changement de pneus par exemple), affirme commander ses produits en très grande partie par des canaux helvétiques. «Nous ne sommes pas là pour faire la guerre aux autres boutiques, ni pour casser les prix», déclare Stéphane Lambin, gérant du shop du Flon. Les importateurs suisses, qu’il s’agisse de Redpoint Gear, d’Hostettler ou de Coulon, proposent en fait des prix d’achat qui varient selon la quantité d’articles commandés, que ce soit pour le représentant suisse d’une franchise française ou pour une boutique «indigène».
Polo Motorrad, implanté en Suisse depuis 2006 et issu d’une chaîne allemande, représente le même secteur, soit ce qu’on peut appeler les supermarchés de l’équipement moto. Veit Högger, responsable marketing et communication de la société suisse créée pour superviser les sept magasins du groupe, explique qu’environ 70% des produits présentés sont des marques internes, commandées à la centrale allemande. On trouve ainsi les vestes et pantalons Pharaoh, dans le style « adventure ». « Pour les 30% restants, nous passons par les importateurs suisses », continue-t-il. Chaque store Polo propose à peu près le même assortiment, mais Polo ne sélectionne qu’une partie des habits et équipements des marques autres que les siennes. Tout en adaptant son catalogue d’année en année en fonction de la demande.
Face à cette évolution, face aussi au différentiel des prix entre la Suisse et les pays voisins, certains commerçants romands ont réagi et ont pris l’initiative de créer MotoGooDeal, un site Internet où les prix sont (au moins) 10% plus bas. Le client a le choix entre recevoir son casque ou sa veste par la poste, ou dans l’une des quatre boutiques partenaires (pour l’instant), dont Motoshop à Genève, et Moto Furia à Lausanne.
«Nous travaillons avec les importateurs, précise Fabien Feuardent, l’un des initiateurs de MotoGooDeal. Nous réduisons en fait notre marge pour proposer ces prix.» Et la sélection de produits disponibles en ligne est, elle aussi, quelque peu limitée.
« Nous sommes en discussion avec Moto Axxe pour trouver une solution, annonce pour sa part Philippe Rumo, de Redpoint Gear, qui représente Arai, Ixon et Alpinestars en Suisse. Quant à MotoGooDeal, ils ont pratiqué de gros rabais au début. Nous leur avons demandé, pour nos produits, de ne pas descendre en règle générale en dessous de 10%. Nous ne sommes plus présents, par contre dans les magasins Polo. »
« Moto Boutique est là depuis 1972, et nous avons su nous adapter, commente pour sa part Jeremy Gould, patron de ce magasin lausannois. Quand Polo a ouvert, nous l’avons beaucoup senti la première année, moins la deuxième. Et après, plus vraiment. Je crois que leur clientèle n’est pas la même que la nôtre. Nous pouvons offrir une longue expérience des produits. » Il n’hésite pas non plus à faire un effort au niveau des prix. Il a ainsi pratiqué un rabais général de 15% sur tout le magasin à la suite de la dégringolade de l’euro face au franc, avant même que les importateurs décident de leur nouvelle politique de prix.
Par Jérôme Ducret, photo Philippe Maeder et dr, article paru sous une autre forme dans 24 heures et la Tribune de Genève