Portrait d’un champion en proie à l’adversité
Kenan Sofuoglu est de loin le pilote au meilleur palmarès dans le Championnat du Monde Supersport. Il détient les records dans quasiment tous les domaines mais est en plus maintenant quadruple Champion du Monde, alors qu’il était déjà le seul pilote à avoir décroché le titre Supersport à trois reprises. En 2015, le pilote turc a cependant dû surmonter de nombreuses épreuves pour continuer à écrire sa légende.
Originaire d’Akyazi (dont le code postal est 54, son numéro de course), Sofuoglu démarre sa carrière professionnelle en 2003 et manque alors le titre de l’IDM (Championnat d’Allemagne) de seulement dix points. Cette année-là, il fait aussi ses débuts dans le Championnat du Monde Supersport en courant à Valence, à Oschersleben et à Magny-Cours. Valence deviendra le lieu de sa première pole position, en 2007, mais il décroche sa première victoire dès 2006, à Assen, en s’imposant avec plus de quatre secondes et demie.
Il remporte ses deux premiers titres de Champion du Monde Supersport avec Hannspree Ten Kate Honda, en 2007 et 2010, puis s’offre un nouveau titre en 2012, en roulant cette fois-ci pour Lorenzini Kawasaki, après avoir tenté sa chance dans le Championnat du Monde Moto2 en 2010 et 2011. Lors de sa seconde année en Moto2, il monte sur le podium à Assen, finissant derrière Marc Márquez, alors futur Champion du Monde MotoGP.
Si sa saison 2015 est celle de son quatrième titre, elle est aussi celle de la plus dure épreuve qu’il aura dû surmonter. La première manche, à Phillip Island, s’avère plus compliquée que prévue et le pilote du team Kawasaki Puccetti Racing doit remonter à la sixième place après un incident avec Gino Rea. Il monte cependant sur le podium lors de la course suivante, en Thaïlande, où il se qualifie en pole position et finit deuxième derrière Rattharpark Wilairot. Il réalise ensuite une série de quatre victoires consécutives à Aragón, Assen, Imola et Donington, et capitalise sur les abandons de son rival, Jules Cluzel, qui perd 50 points sur problèmes techniques au MotorLand et à Buriram.
Alors que tout va pour le mieux en piste, Sofuoglu est touché par un drame familial durant l’été lorsque son fils Hamza, nouveau-né, doit être hospitalisé pour de graves problèmes de santé. Malgré la situation critique de son fils, Sofuoglu décide de courir à Imola, dont il repart immédiatement après un nouveau duel face à Cluzel, avec qui il s’était déjà férocement battu à Assen. Après sa série de quatre victoires, Sofuoglu s’incline face au Français au Portugal puis finit onzième à Misano après avoir été poussé à commettre une erreur par Lorenzo Zanetti dans le dernier tour, alors que les deux se disputaient la troisième place.
À son arrivée à Sepang pour la neuvième manche, le paddock avait déjà appris la terrible nouvelle et le décès du jeune Hamza. Présent en Malaisie malgré tout, Sofuoglu fait preuve d’un immense courage pour poursuivre sa mission et prend la quatrième place derrière PJ Jacobsen, Cluzel et Zanetti.
Lorsqu’il arrive à Jerez, à mi-septembre, Sofuoglu n’a plus que 13 points d’avance alors qu’il en avait 45 après Donington. Cluzel, son principal adversaire, se blesse cependant lors des essais libres et se voit contraint à renoncer au reste de la saison. « Je suis désolé pour Jules, » commente alors Sofuoglu. « Il mérite aussi de remporter le titre. Peut-être que nous avons eu un peu de chance mais je suis aussi passé par des choses très difficiles cette année. La vie nous réserve des moments très durs et c’en est un pour lui. Je suis désolé pour lui et pour son team. »
Sofuoglu concrétisera deux semaines plus tard, à Magny-Cours, où il finit deuxième derrière Jacobsen, pour remporter son quatrième titre de Champion du Monde Supersport. Sa victoire confirme aussi le titre Constructeur pour Kawasaki face à MV Agusta.
Doté d’une détermination sans faille et d’indéniables qualités sur le plan humain, Sofuoglu a su surmonter la plus cruelle des épreuves cette année pour écrire un nouveau chapitre de l’histoire du Championnat du Monde Supersport et s’affirmer parmi les plus grands sportifs de 2015.
Texte/Photo: worldsbk.com