La nouvelle 1290 Super Adventure S, pour voyageurs Alpha
Pour 2017, le vaisseau amiral de la firme autrichienne (numéro un en Europe) se bonifie. Encore plus de pêche (c’était manifestement possible), mais aussi une meilleure ergonomie et un confort revu à la hausse.
La nouvelle 1290 adopte un nouveau visage pour 2017. C’est ce qu’on dit d’habitude pour décrire des évolutions de modèles chez un constructeur. Mais là, le changement est conséquent. Le phare avant du vaisseau amiral de KTM, que nous avons pu tester récemment en Sicile, est vraiment unique dans le monde moto.
Le faciès se résume à un fer à cheval lumineux, avec de chaque côté d’une fente verticale des zones éclairées par réflexion. On ne peut le confondre avec aucun autre. Sauf peut-être les faces avant des roadsters KTM de la famille Duke, versions 2017. Ils arborent le même look. Et celui-ci va se progressivement se généraliser dans la gamme du constructeur autrichien.
Bon, cette nouvelle optique ne plaît pas à tout le monde, et c’est bien ainsi. Mais elle a du charme, surtout vue « en vrai ». Et elle éclaire vraiment bien (une partie du test s’est déroulée après le coucher de l’astre solaire). Y compris en virage quand la moto est penchée – c’était déjà le cas sur la 1290 Super Adventure 2016 (lire notre test précédent). Le changement n’est pas qu’esthétique, notez bien. Le phare est ainsi devenu plus léger, plus efficace au niveau de la gestion de la chaleur produite par l’éclairage. On voit que chez KTM, on est toujours autant maniaque de la performance…
Et cette remarque vaut bien évidemment encore plus pour le moteur de la nouvelle 1290 Super Adventure S. Déjà, celui de la précédente version n’était pas triste. Mais là… en haut, pas moins de 160 chevaux. Mais surtout, du couple phénoménal (100 Nm) déjà dès 25oo tours par minute. Et ça grimpe jusqu’à 140 Nm. Autant qu’une Ducati Panigale, qui est une bête de course. On peut dire que les accélérations de cette KTM sont foudroyantes. Avec un beau bruit d’aspiration. Et une autre belle sonorité quand on coupe les gaz et qu’on laisse le frein moteur s’exprimer!
Le fait que nos motos de test soient toutes équipées du « silencieux » d’échappement sport de marque Akrapovic ne change pas fondamentalement la donne. Le son était juste un peu plus grave que celui du silencieux de série.
Une machine à accélérer
Comme presque tous les moteurs KTM récents, ce bloc LC8 (son appellation officielle) apparu pour la première fois sur feu la Superbike RC8 est très enclin à prendre des tours. Du coup, cela devient par moment presque trop facile. Pas besoin de se donner beaucoup de mal pour rouler vite. Il suffit de visser la poignée en sortie de virage. Ou même un peu avant. Il y a un contrôle de traction performant (non ajustable, mais qui s’adapte selon le mode de pilotage choisi). Il tient compte aussi de l’inclinaison de la moto pour moduler son action. Cette aide au pilotage était déjà présente sur la 1290 Super Adventure (tout court) 2016.
A ce propos, une petite explication rapide. Au départ, KTM avait lancé sur le marché l’Adventure issue de la moto qui a couru dans le Paris-Dakar, avec le moteur monocylindre LC4. Puis sont venus les Twins. Dont la 950 en 2003 (avec carburateur). Qui est devenue la 990 à injection. Puis, en 2013 est apparue la 1190 Adventure, une véritable révolution interne. Elle apportait notamment le contrôle de traction et toutes sortes de systèmes électroniques permettant d’éviter de se mettre au tas. Pour une puissance maximale conséquente de chevaux. Une version R figurait en complément pour ceux qui voulaient de vraies signes distinctifs d’une moto de tout-terrain – dont une roue avant de 21 pouces.
Deux années plus tard, KTM a voulu en faire plus – et moins. En 2015 la 1290 Super Adventure est donc arrivée pour compléter la gamme. Il s’agissait du modèle au sommet, tant de l’équipement que de la puissance. Et à l’autre extrémité, il y a eu simultanément las 1050 Adventure. Meilleure marché que la 1190, moins puissante, moins équipée, mais en gros presque autant compétente. Plus légère aussi.
La 1190 disparaît
Cette année, les choses se simplifient. Quelque peu. Plus de 1190. La 1050 devient 1090, en version normale routière, ou R plus adaptée au tout-terrain.
Et à l’autre bout de l’échelle, la 1290 se « splite » en trois sous-modèles. La 1290 R – pas besoin d’explication. La 1290 S, que nous avons testée, orientée route et sport, avec des roues de 19 et pouces, qui plus est à bâtons au lieu de rayons. Et la 1290 T, avec valises, tutti quanti et gros réservoir, l’héritière spirituelle de la première Super Adventure.
La Super Adventure S, comme ses deux consoeurs équipées du « gros » moteur est à la fois plus puissante et moins polluante que la première Super Adventure. A cause ou grâce aux nouvelles normes européennes Euro 4, qui sont entrées en vigueur cette année pour tous les nouveaux modèles. KTM a réussi ce tour de force technique en revisitant une bonne partie du fonctionnement interne du gros bicylindre en V refroidi par liquide.
Moteur puissant et souple
Il y a tellement de couple délivré que l’on n’a jamais le moindre à-coup à la remise des gaz. Même en mode Sport, encore plus réactif. Et, ce qui est plus étonnant, le LC8 2017 est très souple. Il accepte de reprendre en quatrième à 1700 tours par minute sans caler. Avec juste quelques hoquets fugitifs.
Les suspensions électroniques semi actives sont toujours aussi performantes (elles ont été introduites sur la première Super Adventure). Nous avons pu les mettre à l’épreuve sur plus de 200 kilomètres de routes diverses autour du volcan Etna et en ville de Catania. Avec un peu d’autoroute, et pas mal d’asphalte défoncé, rendu glissant par la présence de sable, de terre, de gravier et même de glace.
La seule chose qui ne se règle pas automatiquement est la précharge. On peut cependant le faire en quelques secondes en utilisant les commandes au guidon, et en choisissant les désormais classiques réglages – pilote, pilote avec bagages, pilote et passager, et enfin pilote et passager avec bagages. Si cela vous rappelle quelque chose, c’est parce que ce système est devenu assez répandu sur de grosses motos de tourisme de plusieurs marques différentes – on ne donnera pas de noms.
A bord de la surpuissante KTM 1290, ces suspensions sont un formidable atout. Elles empêchent ainsi l’avant de la moto de plonger lors de freinages appuyés. Et font de même avec l’arrière en cas d’accélération conséquente – un peu tout le temps, donc. L’assiette du véhicule conserve alors une remarquable stabilité quel que soit le type de pilotage.
La Super Adventure n’est pas parmi les motos les plus compactes. Mais, grâce à un châssis léger et rigide là où il faut, grâce aussi au système de suspensions semi-actives de marque WP, on a la nette impression que ce monstre est agile et fin sur ses pattes. Il réagit avec précision à la moindre impulsion, sans que cela devienne pour autant instable ou dangereux. Dans les courbes rapides (plus de 100 km/h sur des routes de montagne au revêtement pas toujours très plat), on est sur un rail. Qui plus est confortable.
Stable comme un rail, et malgré tout agile
Lors d’enchaînements de petits virages, on peut balancer la bête d’un côté comme de l’autre avec une facilité déconcertante. Le centre de gravité n’est pas très bas, mais la partie-cycle, roues comprises, fait plus que compenser. Et puis le moteur, et la moto en général, est très fin entre les jambes, ce qui fait qu’il y a peu d’inertie à vaincre pour changer de direction. On précise que la moto est livrée avec un amortisseur de direction.
Quand il faut ralentir, on a le choix entre les étriers antérieurs, redoutables de puissance mais faciles à doser, et le disque arrière. Celui-ci, d’un bon diamètre, agit comme une traînée qui ralentit l’engin juste ce qu’il faut pour l’inscrire en courbe avec une bonne inclinaison.
Réglées sur le mode « Confort », les suspensions sont encore plus jouissives. Il y a de petits mouvements d’amortissement en plus, mais aucune déviation de la trajectoire ni de l’assiette. Et c’est parfait pour les ruelles pavées des petits villages qui s’égrènent sur les flancs du volcan Etna. Il faut ajouter que le débattement conséquent aux deux bouts du véhicule aident aussi fortement. La Super Adventure est tout à fait capable de rouler sur un chemin en terre, sur du gravier, sur un terrain fait de trous et de bosses, avec un bon confort et un contrôle optimal.
Selle assez haute
Le seul détail auquel il faut être attentif est la hauteur de selle et le centre de gravité qui est placé relativement haut (par rapport à une moto avec moteur Boxer, par exemple, ou à un cruiser). Si l’on est court sur jambes, il faut déployer un peu d’habileté pour grimper sur la selle, même dans son réglage bas. Et bien tenir la moto quand on manoeuvre dans une pente.
Une autre caractéristique bienvenue est la légèreté de la commande d’embrayage. Pas besoin de beaucoup de force pour passer les rapports. Notre exemplaire de test était de plus fourni avec un Quickshifter fonctionnant aussi en montant les rapports qu’en les descendant. Qui fonctionnait parfaitement. Il n’y a que en première ou deuxième, haut dans les tours, que l’on peut subir un petit coup sec au passage du rapport supérieur. Mais pas dans l’autre sens, où l’on coupe les gaz pour passer par exemple de la troisième à la deuxième vitesse.
Ce mécanisme fait partie sur la 1290 du Travel Pack, qui comprend aussi le Hill Hold Control. Une aide au démarrage en côte. C’est simple. Si l’on tire fortement le levier de frein, moteur débrayé, la moto s’immobilise durant quelques secondes lorsque l’on relâche l’embrayage et les freins. Autrement dit, elle freine toute seule, en bloquant la roue arrière. Il suffit d’ouvrir la poignée des gaz de quelques centimètres pour que cela cesse. Pratique pour un bestieau pesant 215 kilos à sec.
« Non mais, allô? »
Le Travel Pack inclut aussi un anti-dribble électronique agissant sur le moteur, et une fonction reliant par Bluetooth un smartphone avec l’électronique de bord. On peut alors: savoir quel est l’état de charge dudit téléphone, recevoir et accepter un appel, si l’on porte des écouteurs et un micro nantis eux aussi de la fonction Bluetooth, et même faire passer dans ces écouteurs la musique enregistrée sur son iPhone ou Samsung – ça fonctionne avec les systèmes iOS et Android. On trouve une fonctionnalité similaire sur d’autres modèles KTM – les nouvelles Duke et Super Duke – et sur d’autres motos premium chez la concurrence.
Si l’on parle de dotation et d’équipement, la Super Adventure S est très bien fournie et, ce qui est nouveau, tout est d’une ergonomie parfaite. Comme sur la version précédente, des feux de virage supplémentaires s’allument dès qu’on dépasse une certaine inclinaison. A gauche si l’on penche à gauche, idem pour la droite, et plus l’on penche, plus l’éclairage est fort. Notre parcours se terminant après le coucher du soleil, nous avons pu vérifier l’efficacité de ce système.
Le tableau de bord, en couleur, est construit d’une manière qui empêche au soleil d’ajouter des réflexions parasites. Le film sur lequel s’affichent les informations est en effet collé au verre au plus près, ce qui fait que les rayons de l’astre solaire n’ont pas de place pour faire des ricochets ennuyeux. Vérification faite, cela fonctionne parfaitement, que le soleil soit rasant, frontal, venant de l’arrière, fort ou faible. Il y a au pire une petite tache moins lisible sur un bout d’écran, mais on voit bien tout le reste.
Un tableau de bord très complet
Ce tableau de bord entièrement digital est aussi extrêmement complet, sans devenir trop compliqué à lire. On a à droite les infos essentielles: régime moteur, vitesse, mode de pilotage, mode d’amortissement, degré de précharge. Avec en option le réglage choisi pour les poignées chauffantes ou la selle chauffante (pilote et/ou passager).
Sur le côté gauche s’affichent différents choix d’autres infos, entre lesquelles on passe de manière simple et rapide grâce à un bloc compact en forme de croix (quatre boutons) sur le comodo gauche. On a le choix du mode de pilotage: Street (pleine puissance, réponse normal de la commande d’accélération), Sport (réponse plus vive, contrôle de traction au minimum), Rain (puissance réduite, ABS et contrôle de traction au maximum) et Enduro (puissance réduite, dérapages autorisés). Comme celui du réglage des suspensions, avec une modalité tout-terrain.
Il y a aussi un totalisateur, deux partiels, la vitesse moyenne, la consommation d’essence pour chaque trip, l’heure, la température de l’air, la pression des pneus, l’autonomie restante, une jauge à essence, la distance parcourue, les derniers Tweets de Donald Trump et l’âge du capitaine (on vous laisse comprendre ce qui relève de la fiction). Mais, crucialement, tout est sous contrôle, et les infos sont bien hiérarchisées.
Affichage de vitesse à géométrie variable
Fait pittoresque, quand on dépasse une certaine vitesse (vers 150 km/h), le nombre de kilomètres par heure affiché grossit. Comme pour avertir, ou rendre la lecture plus rapide.
Curieusement, un message d’erreur sur fond rouge s’est affiché un moment durant ce test. Il nous disait tout de go qu’une erreur d’ABS s’était produite. A la conduite, rien ne changeait pourtant. C’est peut-être dû aux ondes dégagées par le testeur, mais ce genre de « gremlin » électronique s’set produit à chaque fois qu’il a essayé un membre de la famille Adventure… Et puis il faut avouer que le message avertissant du risque de verglas, en noir sur fond jaune, est un peu intrusif.
On parle d’ergonomie, et cela s’étend aux signofils (qui s’éteignent tout seuls au bout d’une dizaine de secondes) et au pare-brise. Celui du modèle précédent n’était pas évident à régler en roulant et causait pas mal de turbulences. Tout est plus simple sur cette nouvelle version – on ajuste la hauteur avec l’une ou l’autre des petites roues dentées sur le côté, facile à faire en roulant, avec une main. L’aérodynamique de l’avant de la Super Adventure est aussi bien meilleure. Pare-brise en position haute, on sent une légère pression sur le sommet du casque, et c’est tout. Les dégagements de chaleur intempestifs des gros cylindres sont à présent maîtrisés.
Comme auparavant, on peut pivoter le guidon (avec des outils) pour varier l’éloignement, et déplacer les repose-pieds. Les deux leviers de frein avant et d’embrayage sont réglables en écartement. De plus, le tableau de bord lui aussi est ajustable dans son inclinaison. Même le tempomat est à la hauteur de la concurrence germanique – et il est désormais sur le côté gauche.
Enfin la selle, réglable sur deux hauteurs sans outil, est moëlleuse, mais offre aussi une bonne adhérence pour la conduite sportive. Ah, et puis le démarrage se fait par la simple présence près de la moto d’une clé sans contact. Y a plus qu’à mettre le contact, et peser sur le bouton.
Pas de louvoiement, même avec les valises chargées
Avec la bagagerie latérale, la moto demeure tout aussi stable en virage. Les valises sont fixées sur des points d’attache discrets et efficaces, et un nouveau système « flottant » permet de ne pas transmettre leurs mouvements au reste de la moto. Si l’on peut chipoter, on regrettera que l’un de ces deux bagages (à droite, du côté du pot) soit un peu mince en contenance. Et l’on n’a pas pu tester leur imperméabilité.
Ce qui est sûr, par contre, c’est que l’on peut aller très loin, très vite, sans se fatiguer avec cette nouvelle 1290 Super Adventure S. Une sorte d’enduro de voyage pour voyageur Alpha, au sommet de la meute. La consommation d’essence n’est pas négligeable (entre 7,2 et 7,6 l/100 km), mais la contenance du réservoir autorise de longues étapes. Du genre pas loin de 300 km.
Galerie photos: KTM 1290 Super Adventure S
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