La « révolution » Street Triple à l’épreuve du bitume
La nouvelle version du roadster fun par excellence, la Street Triple 765 (en version RS) tient ses promesses. Sur route comme sur circuit (Catalunya, Montmelò, excusez du peu).
Quand ils ont dévoilé les dernières évolutions de leur roadster fétiche, les représentants de la marque anglaise Triumph n’y sont pas allés de main morte. Ils ont carrément balancé le terme de « révolution » (lire notre présentation). Eh bien nous avons pu mettre cette « révolution » Street Triple à l’épreuve du bitume, lors du test organisé par Messieurs les Anglais en Catalogne.
Ce test s’est déroulé sur route, comme sur circuit. Pas n’importe quel circuit. Carrément celui de Montmelò, qui accueille chaque année une manche du championnat mondial MotoGP!
La précédente version de la Street Triple était déjà jouissive (lire notre test). Cette moto a véritablement révolutionné le marché lorsqu’elle est apparue en 2007. Il s’agissait d’un engin de capacité moyenne, le plus léger de sa catégorie, plein de punch et avec un moteur et une partie-cycle qui le plaçaient un cran au-dessus de la concurrence en terme de plaisir sur la route. Les années ont passé et Triumph clame en avoir vendu plus de 50000 de par le monde, toutes versions confondues. Mais justement, la concurrence a fini par se réveiller.
Et c’est ainsi qu’est arrivée la nouvelle version, qui se décline rappelons-le en trois versions (enfin trois et trois quarts): la S, d’entrée de gamme, la R, plus velue, et la RS, le top. Elles utilisent le même moteur et le même châssis, mais se distinguent par le niveau de performances tirées de ce moteur et par certains éléments de leur partie-cycle (suspensions, freins) et de leur équipement (aides électroniques au pilotage). Et c’est bien sûr la RS que Messieurs les Anglais nous ont mis entre les gants.
Confortable sur chaussée mouillée
Les débuts ont été humides: routes mouillées et brouillard au menu. Hop, on met le mode de pilotage Rain! Ca rend plus douce la réponse à la commande d’accélération, et ça met le contrôle de traction sur ses grands chevaux. Et force est de constater que tout va bien. La moto est rassurante, facile, neutre, le moteur est linéaire. Tout en offrant quand même un joli bruit d’aspiration quand on ouvre la poignée. Tiens, oui, il n’y a plus le fameux sifflement caractéristique des moteurs trois-cylindres Triumph. Certains le regretteront, mais pas moi.
Et puis ces suspensions sont certes fermes, mais très confortables. Il y a de la qualité là-dedans. Normal, vu leur provenance – elles portent le nom d’un certain spécialiste suédois… la selle n’est pas mal non plus. En tout cas elle offre un bon appui.
Et la position de conduite n’est pas extrême. On a de la place. Mon mètre 70 avec petites jambes touche terre – pas les pieds à plat, non, mais c’est suffisant. La Street est restée fine à l’entrejambe. Elle est d’ailleurs plus légère que la version précédente. Un exploit, quand l’on sait que le moteur cube plus gros et qu’il y a plein d’équipement électronique en plus sur cette 765 nouvelle! Côté ergonomie, les deux leviers d’embrayage et de frein sont réglables, en écartement. Pour le second, on peut même ajuster la pression nécessaire pour l’actionner (sur trois positions). Au vu de la météo, les techniciens Triumph ont eu la bonne idée d’ajouter des poignées chauffantes, qui sont extrêmement bien intégrées au guidon. Elles chauffent plutôt fort, même au minimum des quatre réglages possibles.
Le seul défaut qui reste, si on veut, c’est qu’il est toujours difficile de bien braquer le guidon pour par exemple faire un demi-tour resserré. Bin oui, il y a de la Daytona dans ce châssis.
Puisque le rythme est u peu ralenti par les conditions de route, on prend le temps de faire connaissance avec l’écran couleur et les différents boutons de chaque côté du guidon. On peut facilement configurer l’affichage – mais pas en roulant. Ce que l’on peut par contre faire sans s’arrêter c’est consulter différentes informations en actionnant le levier à gauche du guidon. Il y a un peu tout ce qu’il faut. Ce même levier fait office de « curseur » (Triumph le qualifie de joystick) quand on navigue dans les menus des réglages, après avoir appuyé sur un second bouton, posté cette fois sur le comodo droite. Il y a aussi un troisième bouton, à gauche, qui sert à changer de mode de pilotage « on the go ». Simple et intuitif.
Enfin la moto, qui est équipée (la R aussi) avec des phares de jour, choisit automatiquement l’écran jour ou nuit. On peut si on le préfère opter pour un affichage sur fond blanc. Ai-je mentionné le fait que les clignotants s’éteignent automatiquement au bout d’un certain nombre de secondes?
Mais cette Street Triple ne vous laisse pas longtemps vous contenter d’un roulage en mode Rain. Le fun reprend très vite le dessus. On passe en Street, justement. Et là, c’est déjà plus jouissif. Ca accélère bien fort sur les deux premiers rapports de vitesses. Plus que dans la version 2016. L’effet d’un moteur avec plus de capacité, plus de puissance, et surtout plus de couple sur toute la plage des régimes. Mais aussi de rapports raccourcis en bas. En fait, Triumph les avait rallongés sur l’évolution 2015 du modèle 675, parce que paraît-il c’était trop nerveux pour certains. Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis, dit le dicton.
Petits levers de roue entre amis
Là, c’est bien redevenu nerveux. Même avec le contrôle de traction (en mode Street, donc), on peut lever la roue avant si l’on ouvre les gaz brusquement en première ou deuxième. Mais tout est sous contrôle et la Triple repose gentiment son pneu avant sur l’asphalte catalane. On a aussi essayé en mode Sport, identifié sur le tableau de bord par une route qui n’est plus droite (Street) mais qui ondule. Même réaction, qui arrive encore un peu plus facilement, parce que la réponse de la poignée des gaz est nettement plus agressive.
On note que le dosage des gaz est parfait à notre goût. Il n’y a pas sur route de trou dans l’accélération, pas d’à-coup quand on ferme et qu’on rouvre la poignée, et c’est précis et facilement dosable. Ca valait la peine de passer à Euro 4! On n’a pas perdu ce caractère immédiat et joyeux si cher aux fans de ce modèle.
Un petit mot sur les freins, les pneus et le train avant. Ils sont dosables, puissants, assurent une excellente adhérence quel que soit l’état de la route et il est granitique. A l’arrière, selon le mode de pilotage choisi, ça peut frétiller sur route mouillée ou sale. Mais on sait très vite ce qui se passe et jusqu’où l’on peut aller. Un bon feedback, donc, en anglais. Le couple boîte de vitesse – embrayage est doux et rapide. On se surprend parfois à rétrograder sans utiliser le levier à la main gauche, preuve s’il en fallait que Triumph a fait de gros progrès depuis les premières Street Triple.
La consommation d’essence est raisonnable, pour le caractère de cette moto. Le réservoir étant assez grand (un peu plus de 17 litres), il y a de quoi atteindre les 300 km (en roulant très doux),
Sur circuit, facile aussi
Le soleil finissant par se montrer en plein vers les alentours de midi (heure espagnole, donc un peu plus tard), on se retrouve avec bonheur sur un autre type d’asphalte. Celui qui recouvre les virages et la ligne droite du circuit de Catalogne, à Montmelò. Avec sa nouvelle chicane.
Là, tout est devenu sec à part la grande ligne droite des stands. Il est temps de faire gronder le trois-cylindres un peu plus haut dans les tours et de mettre à profit les pneus Pirelli Supercorsa SP, peu sculptés, et pour cause.
Malgré les dimensions du circuit et ses pièges, la Street RS est toujours aussi neutre et agile. Ses freins permettent de reculer de tour en tour les repères, et les suspensions sont parfaitement à la hauteur. Il y a des hauts, des bas, un virage à l’aveugle, et de petites imperfections sur le ruban noir. Mais la Triple ne se décompose pas. Même au bout de la ligne droite (vitesse atteinte: 222 km/h, les plus rapides sont allés jusqu’à 235 km/h) un freinage de dernière minute (seconde?) ne la fait pas gigoter le moins du monde.
Elle est cependant très réactive. Il faut exercer un peu de précision dans ce qu’on fait, sinon on se retrouve là où l’on n’aurait pas voulu aller. Ce qui est en fait plutôt un compliment. Si l’on y va, c’est bien toujours parce que d’une certaine manière notre incompétence l’a voulu. Mais la machine insuffle une grosse dose de confiance dès le départ pour qui ne connaît ce tracé que par les retransmissions des courses de MotoGP.
Et là aussi, la position de pilotage est bien étudiée. On se déplace facilement à gauche, à droite, en arrière ou en avant. Tout ne demande que peu d’effort. Sauf qu’il faut un peu cravacher le moteur, parce qu’on a parfois l’impression qu’il accélère de manière tranquille, tout spécialement haut dans les tours. Alors qu’en bas et surtout au milieu du compte-tours, ça donne une impression beaucoup plus vive. Mais il ne s’agit que d’une impression. Le mini-creux visible sur le graphique de la courbe de puissance et de couple n’est en fait pas réellement là en roulant, il n’y a pas de pause dans l’élan.
Contrôle de traction et ABS déconnectables
Et l’électronique? La bonne nouvelle, c’est qu’il y a un mode Track (vous avez compris, n’est-ce pas?). Il autorise un peu de patinage de la roue arrière et de glissade de la moto au freinage. L’ABS n’est actif que sur la roue avant. Ce n’est que lors de freinages appuyés en pleine compression au moment où l’on commence à tourner la moto que ledit ABS se fait sentir de manière un peu intrusive. Mais rien n’est plus simple que de le désactiver complètement.
Quant au Quickshifter, il prend bien sûr tout son sens dans ce contexte. Utile pour garder la ligne et l’accélération dans les grands virages inclinés de ce circuit. Mais en descendant les rapports, l’embrayage assisté est aussi assez efficace et empêche les délestages de la roue arrière.
Cette moto est en fait un peu unique dans son genre. D’abord de par son positionnement en termes de prix, et ensuite de par la qualité de ses finitions et de ses équipements. Selon Miles Perkins, responsable du développement des produits chez Triumph, « on peut à la rigueur la comparer avec le MV Agusta Brutale 800… » Si c’est lui qui le dit.
La Street Triple RS (12300 francs sans les frais de mise sur la route) sera disponible dès le mois de mars. La version R, un peu moins sophistiquée, optimisée pour plus de couple et reconnaissable à son cadre rouge, sera proposée à partir de 11900 francs et arrivera en mai. La S plus basique ne devrait en principe pas être importée en Suisse – à moins qu’un client le demande à genoux. La version pour permis A limité, avec un moteur plus petit, et sinon identique à la S, est attendue pour juin, tandis que la R rabaissée pour les personnes à hauteur limitée ne sera pas là avant le mois d’août.
Galerie photos: Street Triple RS
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