La 890 Duke R à l’essai, ou la gentille et la bête
Il y avait la 1290, «la bête», et la 790 «la plus gentille», maintenant il y a la «gentille bête», alias la KTM 890 Duke R, qui est un redoutable mélange de performance et d’efficacité, facile au quotidien et exploitable. Le plus gros problème sur cet essai a été de rendre les clés.
La voilà enfin!!!! Après la frustration de l’annulation de la présentation de presse sur le circuit d’Almeria en Espagne pour cause de Covid-19, la voici, la Duke 890 R de KTM. Bon, il faut dire que j’ai un petit faible pour la marque, du coup je suis excité comme une puce. Nous avons pu mettre la main sur un exemplaire prêté en Suisse par la filiale suisse de KTM, et avons roulé avec durant environ une semaine.
Esthétiquement c’est une KTM, on aime où on déteste. Le code couleur est clair: réservoir blanc, cadre et jantes orange, c’est une R. Les lignes sont connues de la 790 Duke (lire notre dernier essai), mais ce coloris la rend un peu plus agressive, et comme le haut du réservoir est noir, ça diminue un peu l’impression de bosse de chameau. Le phare avant en forme de fer à cheval, lui, annonce la marque avec une identité visuelle marquée. La ligne globale est à mes yeux belle et fine, bien aidée par l’amputation des repose-pieds passager, par le capot de selle et le pot Akrapovic (ces derniers en option). La moto est livrée en monoplace mais avec l’homologation deux places (selle passager et cale-pied en option). Bon, je ne ferai pas de commentaire sur le support de plaque, mais les rétroviseurs sont pas mal et les clignotants pas trop grands.
Plus dans les détails, les deux leviers sont réglables au millimètre, ce qui est bien agréable pour être précis dans la conduite. Attention, pour une moto qui vient clairement marcher sur le terrain d’une Triumph Street Triple, la finition des plastiques manque un peu de précision et le T de fourche supérieur fait un peu léger visuellement. La fourche, par contre, en impose, elle est bien mise en valeur et le mérite.
Le tableau de bord en couleur a tendance à faire un peu le yo-yo entre mode jour et le mode nuit dès qu’il y a de l’ombre, mais reste lisible dans les deux cas. Très complet, il permet une bonne lecture des informations et facilite la navigation dans le menu, via la « croix » sur le commodo gauche. Personnellement, je ne suis pas un fan des menus et sous-menus pour régler les modes de conduites ou autres paramètres, mais là je suis séduit par la simplicité et le coté intuitif de la navigation dans les paramètres de la machine.
Puisqu’on y est, parlons électronique! Le modèle testé a les modes Rain, Street, et Sport, plus le mode Track (optionnel), de quoi satisfaire toutes les conditions d’utilisation. Pour ma part, j’ai utilisé le mode Rain, qui baisse la puissance et calme la poignée des gaz, bien utile pour calmer la bête en condition humide et permettre de rouler en toute sécurité. J’ai trouvé le mode Street (pleine puissance) un peu mou à la reprise, du coup j’ai fait mon test en mode Sport, qui permet des belles sorties de courbe tout en restant facilement gérable. La poignée de gaz sans câble a un excellent feeling. Entre l’ABS de virage, l’anti-patinage et l’anti-wheeling, tout est sous contrôle avec un très bon retour d’information. Comme vous pouvez le constater, tous ces trucs ce n’est pas mon dada, alors en selle pour parler sensations!
Assis, j’ai l’impression d’être sur une gentille moto! Elle est fine, les deux pieds sont bien au sol, et la selle est ferme. Ben ouais, c’est une KTM, mais je la trouve très confortable. Le guidon est de la bonne largeur. Tiens, les cale-pieds sont un peu en arrière, ce qui annonce une position juste comme il faut pour rouler confort, et juste assez typée pour rouler sport. Je règle les leviers et tout est parfait, alors gazzzzz! Le bruit du moteur, avec L’Akra, est doux, elle ronronne comme le gentil petit animal qu’elle est ou qu’elle fait croire qu’elle est.
Sur les premiers mètres, je suis scotché par la facilité de cette 890 Duke R. C’est presque une 900 et j’ai l’impression d’être sur une 690 qui ne tape pas. Ah oui, tiens, j’avais oublié: il y a le shifter bidirectionnel (encore une option), du coup les vitesses passent sans à-coup, tout en douceur. En ville, la gentille se faufile dans la circulation avec aisance. Le couple du moteur et un régal pour évoluer en douceur entre 1500 et 4500 tours par minute. Petit passage autoroutier oblige, je me retrouve sur la piste de lancement beaucoup plus vite que les voitures qui arrivent à ma gauche. Oups, je n’ai pas checké le compteur après avoir accéléré…
Une fois passés les 5000 tours, il faut avoir les sens bien en éveil, car tout se passe beaucoup plus vite. Je me cale à 120 km/h à 4500 tours environ en 6ème et suis agréablement surpris par une position confortable. Le fait d’être juste ce qu’il faut en avant pour s’appuyer naturellement contre le vent rend l’exercice de l’autoroute facile.
Pour voir un peu son comportement routier de plus près, je choisis de m’en aller dans le Jura, où les petites routes sinueuses ne manquent pas. En mode balade, c’est impressionnant comme cette 890 R est facile: tout est intuitif et elle réagit au doigt et à l’œil. Du moteur à la boîte de vitesses en passant par les suspensions, j’ai presque la sensation d’être sur une meule pour de la moto-école. Oui, oui, c’est une R de chez KTM et je dis que c’est une moto pour moto-école. Il y en a qui ne vont pas m’aimer, mais cette simplicité de prise en main m’a scotché.
On passe en mode sport
Bon, allez, cette 890 R a quoi dans le ventre? je passe en conduite sportive. J’adapte facilement le réglage de fourche en deux-trois clics grâce aux mollettes de réglage (manuelles!) juste sous le guidon. Et là, même constat: tout est facile. La mise sur l’angle se fait intuitivement. Elle est très stable en courbe, je passe d’un virage à l’autres avec une aisance que je n’avais jamais eu en si peu de temps. Sur l’angle, les suspensions travaillent très bien et la stabilité est sans faille, bien aidée par la monte pneumatique d’origine. Ce sont des pneus Michelin Power Cup 2 qui assurent un très bon grip et un retour d’information optimal.
Mis en confiance par cette KTM, je me laisse aller à rouler non plus avec la gentille mais avec la bête qui sommeille en elle. A ce moment, je découvre un moteur qui aime prendre les tours et fait bondir la bête (KTM la qualifie de « Suoer Scalpel ») d’un virage à l’autre. Bien en appui sur l’angle, je remets les gaz avec générosité et je laisse travailler l’anti-patinage qui assure et fait le job sans parasiter ma conduite plutôt instinctive.
Je sens le pneu arrière qui souffre à chaque sortie de virage sous la force de ce bicylindre qui tient une santé de fer. Un peu optimiste, je me fais surprendre à voir les lignes droites disparaître et n’être plus qu’accélération et freinage entre deux courbes. Un freinage, deux freinages, trois, quatre……. et rien ne change: un feeling chirurgical allié à un mordant dosable au gramme près m’aident à contenir la fougue de ce 890 et a sauver mes fesses de mes excès de confiance.
Pour 12990 frs, KTM vous offre un tour de manège qui sera selon vos souhaits soit une balade bucolique confortablement assis avec un tour de grand huit autorisé dès 10 ans, et des sensations qui vont à peine vous remuer l’estomac… Ou alors, si vous pensez en être capable, elle vous fera faire le tour de grand huit interdit au moins de 20 ans, aux personnes cardiaques, épileptiques, enceintes, et même normalement constituées. Et pour toutes les personnes désirant pousser cette 890 R à ses limites en gardant leur permis, je suggère de l’emmener sur un circuit, endroit où elle pourra exprimer tout son potentiel.
Je précise tout de même que notre exemplaire de test de la 890 Duke R, avec le pot Akrapovic, le pack Track (mode de pilotage Track et désactivation possible de l’anti-wheelie), et le quickshifter bidirectionnel, avait un prix avoisinant les 15000 frs.
Voici en prime l’avis de Quynh Steiner, motarde elle aussi éprise de naked sportives
« La gamme de modèles proposée par la marque orange semblait déjà bien achalandée, et pourtant la 890 Duke R apporte un plus indéniable tant elle est convaincante et se place naturellement entre la Duke 790 et la Super Duke 1290. Avec une ligne élancée et agressive, la 890 Duke R est attirante. Bon, j’admets que l’esthétique des Duke est polarisante, on aime ou pas, mais moi j’adore. Et même son réservoir en forme de bosse de dromadaire comme je l’appelle, qui me choquait sur la Duke 790, s’intègre parfaitement à la ligne de la 890. Une hauteur de selle raisonnable, une moto très fine entre les jambes, un pot Akra, un écran TFT, des cartographies ajustables facilement, et j’en passe … elle est magnifique. La 890 a un gabarit moins impressionnant que la Super Duke, voilà qui est engageant. Une fois assise, la position est confortable, même si la selle est un peu dure. La prise en main de cette moto est étonnamment facile et naturelle tant elle est maniable et légère. Son moteur bicylindre ronronne gentiment à bas régime. OK, on pourrait pinailler et dire que ça tape un peu quand on est bas dans les tours…. mais rien de comparable à un mono quand même. En ville, la 890 Duke R est donc très agréable et maniable. Coupleuse, elle permet une conduite coulée. Un vrai chaton. Mais attention, sous ces airs tout doux se cache un tempérament de feu qui ne demande qu’à s’exprimer. En mode Road, le moteur ne raconte certes pas grand-chose jusqu’à 6000 tr/min, mais au -delà, c’est autre chose! Exit le chaton ronronnant et bonjour la bête rugissante! Un vrai kick une fois qu’on ouvre en grand et là, je vous promets que la 890R vous donne des sensations. Les virages s’enchaînent sans problèmes, la moto se balance facilement d’un côté à l’autre. Le freinage est diabolique et la reprise en sortie de virage puissante, le tout contrôlé par toutes les aides nécessaires. Un véritable jouet. Cette Duke est performante tout en restant facilement maîtrisable et ne demande qu’à dévorer les virages. C’est presque trop facile… »
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