Avec la RS 660, une grosse dose de sport pour la route
Nous avons pu tester durant une journée la toute nouvelle sportive de cylindrée intermédiaire de la marque italienne. Sur des routes pleines de virages grands sou petits, sur des voies rapides et dans les centres habités. Une révélation pour cette machine de 100 chevaux pour 183 kilos, mûe par un bicylindre en ligne.
La route est glissante, il fait à peine six degrés au dessus de zéro. Mais au moins il ne pleut plus depuis quelques heures. La RS 660 qu’Aprilia nous a confié pour la journée est une version de pré-série de la moto qui va arriver en concessions à la fin du mois d’octobre 2020. Nous sommes en Vénétie, tout proches des quartiers de la marque italienne, qui se trouvent à Noale. Et déjà, je souris comme un idiot sous mon casque, au guidon de ce tout nouveau modèle de sportive, sur un petit route qui grimpe à flanc de coteau.
Il faut dire que cette RS 660 est diaboliquement maniable. Elle change de direction d’une simple pression sur le repose-pied. Ou sur une autre partie de la machine. Ca demande très, très peu d’effort. La moto ne pèse que 183 kilos avec les pleins. Elle est super-fine. Et surtout elle est dotée d’un châssis comme Aprilia sait les faire: suffisamment rigide là où il faut pour garantir une bonne directionnalité, mais aussi capable d’une certaine flexion pour permettre, justement, des changements de direction fulgurants, et pour bien amortir les contraintes auxquelles la sportive est soumise par son (ou sa) pilote et par la route.
Vous pouvez aussi voir un compte-rendu de test résumé sur notre chaîne YouTube.
La RS 660 est une sportive de cylindrée intermédiaire. Ce n’est par contre pas une Supersport. Et pas seulement parce que son moteur, un bicylindre développant 100 chevaux, ne correspond pas aux exigences de la classe au niveau cylindrée. La position de conduite est certes sportive, avec un certain appui sur l’avant, et on a des guidons bracelets, mais c’est très loin d’être une torture. Les mains sont placées légèrement au dessus du guidon, et le triangle guidon-selle-repose-pied n’est pas extrême et laisse même une certaine latitude pour le confort.
A l’arrêt, je pose le bout des deux pieds à terre, mais comme la moto est très fine au niveau de la selle, cela reste facile. Et comme l’embrayage est assisté, et donc ne requiert pas beaucoup de force de la part de votre main gauche, et que le rayon de braquage est très correct (rien à avoir avec un Supersport), les manoeuvres et les départs sont assez faciles à exécuter.
Bon, cette moto est assez pratique, elle est agile, mais est-elle exploitable sur la route? A des vitesses autorisées? Là encore, sans hésiter, la réponse est oui. Le punch de ce twin est bon dès les bas régimes, il monte facilement dans les tours et on a une accélération conséquente à partir d’environ 4500-5000 tr/min. A tel point que nous n’avons pas la moindre peine à suivre les Aprilia Tuono V4 1100 de nos ouvreurs, qui délivrent pourtant près du double de chevaux et dont la cylindrée est elle aussi presque deux fois plus élevée que celle de la RS 660. Et ce même lorsque la route est devenue sèche et que les lois de la bonne adhérence reprennent leur place sous nos roues. La petite RS 660 offre un maximum de 100 chevaux, ce qui est remarquable pour un bicylindre.
Les Pirelli Diablo Rosso II qui équipent les RS 660 comme monte d’origine sont même plus rassurants sur asphalte froid ou humide que les Supercorsa que chaussent les Tuono en question. Et puis les petites sportives bicylindres sont plus agiles et plus légères que les « grosses » naked à moteur V4. A leur guidon, on peut changer d’inclinaison avec nettement moins d’effort, et les suspensions sont moins rigides dans leur réglage d’origine, ce qui donne un meilleur confort de roulage général, et permet d’aller tout aussi vite mais en se fatigant moins!
Parce qu’avec ce nouveau modèle, Aprilia crée en quelque sorte un nouveau segment dans le marché moto. On l’a dit, la RS 660 est plus facile à vivre qu’une « vraie » Supersport (typiquement, une Yamaha R6, et dans une moindre mesure la Kawasaki ZX-R 636). Elle est aussi plus sportive, et mieux équipée, que ce que l’on trouve par ailleurs sur le marché hors la catégorie Supersport, que ce soit par exemple une Honda CBR 650 R, ou une Kawasaki Ninja 650. Il n’y a pas beaucoup d’alternatives. On comptera peut-être la Ducati Supersport 950. Qui est une grosse cylindrée, et qui est encore nettement plus chère.
Il faut peut-être aussi savoir que la RS 660 n’est que la première moto d’une série de modèles utilisant comme plate-forme ce nouveau twin de 659 cm3. Il y aura une naked, qui s’appellera fort logiquement Tuono 660, et qui devrait arriver dans la première moitié de 2021. Et un trail de voyage, dont on sait encore peu de choses, à part qu’il s’appellera Tuareg 660. Un patronyme porteur d’histoire chez Aprilia. Qui arrivera peut-être sur le marché l’année prochaine.
On l’a dit, ce nouveau moteur est fun. Il est aussi sympa d’un point de vue sonore. L’échappement distille une jolie musique, propre et grave, et à l’accélération on entend bien la sonorité d’aspiration, qui est comme un rugissement grave lui aussi. Pas de sifflements parasite, pas de bruits mécaniques gênants, et le volume sonore sait rester discret si l’on insiste pas trop avec la poignée des gaz et le compte-tours. Il y a des vibrations à relativement haute fréquence que l’on va ressentir dans les cale-pieds et la selle, à partir d’environ 6000 tr/min et encore pour quelques milliers de révolutions en grimpant dans les tours. Et après on n’y fera plus attention parce qu’on sera accaparé par le prochain virage.
Mais à vitesse légale sur autoroute, ça passe très bien. La démultiplication est longue dans les rapports supérieurs, et l’on peut facilement cruiser en 4ème à 120 km/h. Aprilia a même prévu un régulateur de vitesse, qui est ajustable et qui se commande sur le commodo gauche. Il n’est pas super réactif quand on veut changer rapidement de vitesse, mais sinon il fonctionne correctement.
Aprilia a doté la RS 660 d’un quickshifter de série, qui plus est bidirectionnel. Ce dispositif fonctionne très bien quand il s’agit de descendre les rapports, et on ne doit pas obligatoirement fermer la poignée d’accélération pour le faire. Le caractère du twin fait que dans les deux premiers rapports, c’est néanmoins un peu brusque. Etonnamment, en montant les rapports, c’est plus délicat! Il faut trouver la bonne ouverture des gaz et le bon régime, surtout dans les trois premiers rapports, sous peine de subir de substantiels à-coups. En résumé, le quickshifter est plutôt là pour le plaisir de la conduite sportive que pour la fluidité du pilotage touring.
Quand aux suspensions et aux freins, avec eux, on obtient un excellent feeling pour le train avant. Le mordant des étriers avant est notable, mais on peut bien doser la force appliquée, et la varier au besoin. Derrière, on a un simple ralentisseur, qui fait très vite se déclencher l’ABS, mais qui reste utile pour des corrections de trajectoire en virage.
Lorsque l’on passe d’une petite route déserte à un centre habité, il suffit de calmer la commande d’accélération. Et éventuellement de changer de mode de pilotage électroniquement configuré. Parce que la RS 660 arrive équipée de la suite complète d’aides aux pilotage que le constructeur de Noale peut proposer pour ce prix (un peu plus de 11900 francs). On a cinq modes de pilotage, trois pour la route, deux pour le circuit. Et il y en a deux, un pour la route et un pour la piste, qui sont configurables. On passe d’un mode à l’autre (mais pas de la route au circuit) en roulant, d’une simple pression sur un bouton du commodo droite. Même pas besoin de relâcher l’accélération. Si on veut configurer, il faut s’y prendre à l’arrêt. Les autres fonctions disponibles sont le contrôle de traction (ajustable et configurable), l’ABS de virage (trois réglages possibles, dont un qui le désactive sur la roue arrière, et la fonction de virage peut aussi être désengagée, pour le circuit), le contrôle de wheelie (activé ou désactivé) et le contrôle du frein moteur (trois niveaux). Dans les modes piste, le basculeur du tempomat fait office de bouton pour réguler le degré d’intervention de l’anti-patinage.
Les différents modes changent bel et bien le caractère du moteur, ou du moins la réponse à la commande d’accélération, qui devient beaucoup plus souple en mode « Commute » (notamment pour la ville). Et si l’on désactive l’anti-wheeling, on peut avoir des surprises, car le bicylindre est vif!
Les indications d’usage sont visibles sur un bel écran TFT en couleur. Il n’est pas très grand, mais on distingue bien la vitesse, le régime du moteur, la jauge d’essence électronique et l’info pratique de son choix, comme par exemple le nombre de kilomètres parcourus ou la consommation d’essence. Un peu moins bien les autres indications, comme l’heure ou les settings des aides électroniques. Le contraste est plutôt bon, mais la luminosité (au maximum sur notre écran pendant le test) est parfois un peu faible quand on est en plein soleil.
Au bout d’une journée en selle, on n’est pas fatigué pour un sou. Même après plusieurs dizaines de kilomètres sans changement de position. La selle est bien rembourrée, tout en offrant un bon appui. Et en vous laissant vous déplacer d’avant en arrière ou latéralement. Nous n’avons pas testé l’assise passager en roulant. Elle est correcte, et les repose-pieds ne sont pas trop haut, mais ce n’est pas au niveau d’une GT, évidemment, et il n’y a pas de poignée de maintien.
La protection aérodynamique est bonne, spécialement sur les côtés. La RS 660 a d’ailleurs été conçue avec une sorte de double carénage à l’avant qui maîtrise les turbulences, augmente la stabilité à haute vitesse et dévie les flux d’air chaud provenant du moteur. Mais la bulle d’origine est petite et basse et laisse passer pas mal d’air quand on ne se recroqueville pas très fort sur le guidon. On trouvera un pare-brise plus haut et plus arrondi au rayon des accessoires payants.
Si l’on veut s’aventurer sur un circuit, on devra sans doute raffermir les suspensions, qui sont rappelons-le ajustables en précharge, compression et détente. Et l’on peut ajouter un échappement ou une ligne d’échappement racing, ainsi que l’option qui permet d’inverser le fonctionnement du sélecteur. Comme sur une vraie machine de compétition.
Cette machine sera disponible en Suisse à partir de la fin du mois d’octobre 2020, dans trois coloris différents: Lava Red (rouge et bleu-pourpre), Apex Black (noir avec des touches rouges) et jaune doré (Acid Gold). Elle coûtera 11990 francs.
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