Le Hard Défitour, ou l’enduro pour le plaisir
Nous avons testé l’édition 2021 de ce rallye amateur en Auvergne, sur un seul jour (on peut participer à deux jours). Soit plus de 300 km par monts et par vaux, avec une grande majorité d’étape en tout-terrain, sur des chemins et des pistes. On peut participer avec un trail ou un maxi-trail, et il faut « juste » suivre la trace GPS fournie par les organisateurs. Mais, si le parcours n’est pas qualifiable d’épreuve d’enduro, arriver au bout n’est pas à la portée de n’importe qui.
Le Hard Défitour français est un événement à moto annuel qui n’a pas pour principe d’obtenir un classement à l’issue d’une course. En tant que tel, c’est un rallye touristique. En tout-terrain. Mais la durée et la nature du parcours font qu’il s’agit tout de même d’une épreuve et que tous les concurrents et concurrentes n’arrivent pas au bout de la journée du samedi, ou du dimanche.
Etant fan du Hard Alpitour italien (lire notre dernier compte-rendu), nous avons voulu en avoir le coeur net et nous nous sommes inscrits, avec plusieurs camarades, au Hard Défitour 2021. Qui a toujours lieu dans la même région, en Auvergne. Et contrairement au Hard Alpitour, qui vous fait partir d’un endroit pour y revenir en fin de parcours. Le camping du Moulin de Serre, pour être précis, un endroit sympathique qui vibre en coeur avec l’esprit de la moto et de l’enduro le temps de l’événement, chaque année, années de pandémie comprises!
On peut participer avec toutes sortes de moto. Mais si c’est une vraie enduro, les organisateurs vont vous demander d’adopter un lecteur de roadbook, sur papier ou électronique (on peut leur en louer un) plutôt qu’un lecteur de tracer GPS. James Simonin, grand manitou du Hard Défitour à la tête d’un large comité de bénévoles, et natif de la région, explique: « Ce qu’on veut éviter, c’est d’avoir des participants qui filent à toute bombe à travers la campagne et dérangent les autres utilisateurs des sentiers et chemins que nous empruntons, ou les riverains, ou fichent en l’air la Nature. Donc on veut limiter la vitesse, ce n’est pas une compétition d’enduro! » Une exception est consentie pour les pilotes mineurs ou féminines.
Si vous venez avec une GS, une Ténéré ou une Africa Twin (pour donner juste trois exemples), par contre, vous pouvez tout à fait suivre la trace GPS. La nature de l’événement fera que vous ne serez en effet pas parmi les plus rapides! Chaque inscrit sera équipé d’une balise GPS qui ajoute un élément de sécurité car tant les organisateurs que ses amis peuvent suivre le ou la pilote à la trace. Des marshals (commissaires, en français) sont de plus placés à des endroits stratégiques sur le tracé, et comme on a des ouvreurs, il y a aussi des « fermeurs » qui s’assurent que les attardés ne sont pas piégés quelque part.
Dans notre groupe de petits (et grands) Suisses venus se frotter à ce Hard Défitour 2021, nous avions un peu de tout comme pilotes et comme motos. Des expérimentés, et des moins expérimentés, avec de petites ou de grosses machines. Le sous-signé s’était fait prêter pour l’occasion une Honda CRF 300 Rally, donc le modèle 2021, nanti de pneus d’enduro. Ce n’est pas à proprement parler une vraie machine d’enduro, car ses suspensions sont très souples, et elle est un rien plus lourde, mais sinon ça le fait (lire notre essai).
D’autres étaient au guidon de BMW R 1200 GS, avec les pneus adaptés. Il y avait aussi une Husqvarna 701 Enduro, une KTM 390 Adventure modifiée, une Yamaha WR 250 R (une rareté, légère et punchy) et une KTM 640 Enduro modifiée elle aussi. D’autres Helvètes venus dans un autre groupe étaient eux au guidon de KTM d’enduro de plus petites cylindrées.
Contrairement à d’autres rallyes d’aventouring similaires, il n’y a pas d’obligation au Hard Défitour de rouler en équipe. Chacun peut y aller de manière individuelle. Et James Simonin et son équipe fournissent en cas de besoin une assistance. Mais avec quelque 360 kilomètres à parcourir en une journée, soit près de 13 heures pour les plus véloces, il est grandement recommandé de ne pas rouler tout seul.
Pour deux Suisses de notre groupe (sur des GS), l’aventure s’est arrêtée après à peine quelques kilomètres. Un grand (façon de parler) virage à gauche en montée et en dévers, dont le bord interne était parsemé de gros rochers, et surtout dont la sortie était « ornée » de trois grosses racines successives, a effectué un tri impitoyable. Entre ceux qui tombaient et arrêtaient, et ceux qui pouvaient continuer.
Un embouteillage s’est vite formé dans l’arrière-garde des quelque 300 inscrits à l’entrée de ce virage. Et les gros trails ont subi une véritable hécatombe. Le premier des deux Helvètes stoppés à ce virage est tombé en avant sur les racines et s’est déboîté un os du petit doigt. Il a été emmené à l’hôpital du coin, où l’on a simplement remis l’os en place – il n’était pas fracturé et où on lui a prescrit des anti-douleurs. La GS Adventure, elle, n’avait pas grand-chose!
Le second infortuné, Jean, a été percuté par la moto d’un participant qui redescendait pour trouver un autre passage. Puis, dans le virage, c’est une Africa Twin ancienne qui lui est arrivé dessus. Là encore, la GS n’avait que peu de dommages, mais le pilote avait un gros hématome à la jambe et de belles douleurs. Pas raisonnable dans ces conditions de continuer!
Notre ami Didier, avec sa KTM 640 Enduro modifiée (sabot moteur en alu fait maison, tout comme un tête de fourche façon rallye), a quant à lui donné un gros coup de main pour faire passer un maximum de motos qui encombraient la voie dans ce virage taquin. Puis il a continué son chemin avec sa compagne, qui pilotait la 390 et dont c’était la première participation à un événement de ce genre… ils arriveront presque au bout de l’épreuve, allant jusqu’au point de passage numéro 4, le dernier avant l’arrivée, mais arrêtés par la nuit qui allait tomber et par la barrière horaire mise en place par James et son équipe. Au-delà de 20 heures, on rentre direct au bercail. Histoire de respecter le couvre-feu sanitaire qui était encore en place en ce mois de juin en France!
Deux autres membres du groupe, Christophe et Adrian (la WR 250 R et la 701 Enduro) iront eux jusqu’au bout, en conservant un bon rythme et en surmontant tous les petits et grands obstacles sur leur chemin, gués, troncs et boue compris. Ils rejoindront le camping peu après 19h!
Et pour ma part, n’ayant pas pris le temps de trouver un support pour iPhone à installer sur le guidon de la CRF, je comptais sur les GPS de mes copains sur leurs GS pour me montrer la voie. Mais la dernière BMW du groupe, celle de Carlos, n’est pas allée plus loin que la pause de midi. Pour lui aussi, ce genre de rallye était une première, et il avait épuisé une bonne partie de son énergie dans les premiers kilomètres, à redresser sa moto et à maîtriser sa roue avant dans les montées, souvent prononcées.
Il ne me restait alors plus qu’à trouver un autre poisson pilote, à tenter de suivre des motards français bien plus rapides que moi et à demander aux ouvriers sur les toits des maisons par où étaient passés les motocyclistes du Hard Défitour. Je n’ai pu continuer que pendant encore une cinquantaine de kilomètres avant de devoir me résoudre à sortir des bois et à emprunter la route pour retourner au départ! Dommage, car la petite Honda s’acquittait d’à peu près tout ce que je lui demandais sans broncher, avec une seule chute sans gravité dans une montée parsemée de terre meuble et de gros cailloux.
Le charme du Hard Défitour vient bien sûr des paysages rencontrés, dans des gorges et des sentiers le samedi, sur la plateaux le dimanche (nous n’avons pas testé cette fois-ci). On alterne des passages rocailleux et terreux, avec de jolies montées et de belles descentes, il faut bien maîtriser sa machine et le temps à disposition pour suivre toute la trace n’est pas énorme. Donc ce n’est pas à conseiller pour tout le monde sur n’importe quelle moto. Cela dit, rien n’oblige à aller jusqu’au bout! L’ambiance au camping est vraiment chouette, et c’est un avantage non négligeable de revenir à son point de départ, car cela permet de rouler léger. Enfin le team de bénévoles qui encadrent l’événement sont dévoués, professionnels dans leurs interventions et toujours de bonne humeur!
Dernier point, et non des moindres: cela ne prend que cinq heures (avec une remorque!) pour se rendre sur place depuis la Suisse romande. Alors n’hésitez plus, si vous avez la moto adaptée, et/ou les compétences suffisantes en offroad, inscrivez-vous pour une prochaine édition (dès l’ouverture des inscriptions, en début d’année, en général, et attention, il y a un nombre de places limité). Parce que le prix, qui comprend l’encadrement le long de la trace, le suivi par une balise GPS, la mise à disposition d’un autocollant avec numéro, la trace GPS et diverses autres petites choses, est assez abordable – 200 euros pour le Hard Défitour classique, ce qui veut dire si l’on ne roule que le samedi. Et 300 pour l’extrême, où l’on remet ça le lendemain!
Si vous voulez plus d’infos sur le Hard Défitour, et si l’aventure vous tente, allez faire un tour sur leur site!