Un jeune pilote fribourgeois renonce à une formation, le canton n’accordant pas les congés nécessaires
Kylian Nestola commence une nouvelle saison au Portugal et en Espagne, dans le championnat européen Superstock 600. Mais il ne pourra pas en parallèle entamer un cursus à l’Ecole des Métiers à Fribourg, parce que le canton ne considère par le motocyclisme comme pouvant donner droit à un régime spécial de congés, contrairement à d’autres sports. La solution viendra peut-être de « Talent Cards » que la Fédération Motocycliste Suisse pourrait accorder (et accorde déjà) à de jeunes pilotes, pas seulement en motocross, mais aussi à l’avenir dans les disciplines de vitesse.
Kylian Nestola, un jeune pilote fribourgeois de 16 ans, a terminé l’an dernier sa formation scolaire obligatoire dans le canton de Fribourg. Le jeune homme a depuis plusieurs années consenti à pas mal de sacrifices, tout comme le reste de sa famille qui l’a soutenu, pour mener de front l’école et la participation à des championnats moto de vitesse.
Il est passé par les mini-motos et le pitbike, en Suisse, mais aussi en Italie et dans le championnat européen, avec notamment un titre de champion suisse en 160 cm3.
Ces deux dernières années, il a participé au championnat italien en 600 cm3, dans différentes catégories, et il vient d’être sélectionné comme l’un des deux pilotes du team espagnol Fau55 Tey en championnat européen Superstock 600.
Un team fondé et géré par le célèbre ancien champion espagnol Hector Faubel, et qui fonctionne un peu comme une usine à jeunes talents (lire notre article). Faubel a notamment contribué à l’essor du jeune talent espagnol Firmin Aldeguer, dont les résultats en mondial Moto2 cette année sont encourageants.
Refus du Canton
Mais pour revenir à Kylian, tout au long de sa scolarité obligatoire, et contrairement à ses concurrents espagnols et italiens, voire même genevois ou vaudois, il n’a jamais pu bénéficier de vrais aménagements des horaires et de congés permettant de caser les entraînements et les compétitions lors de l’année scolaire.
Et la galère continue au moment où le jeune pilote veut aborder une formation professionnelle, puisqu’il a dû renoncer à s’inscrire pour cet automne à l’Ecole des Métiers de Fribourg, le canton ne voulant pas entrer en matière pour octroyer les congés adéquats.
Le Superstock 600 européen, le dernier championnat à porter cette appellation, qui désigne des motos le plus proche possible des modèles de série, sur le Vieux continent, se déroule en Espagne et au Portugal, sur les mêmes circuits et aux mêmes dates que le championnat européen de Moto2. Et pour obtenir des résultats, et simplement pour pouvoir s’inscrire auxdites courses, il faut souvent être présent déjà le mercredi…
Les parents du jeune pilote ont formellement déposé une demande auprès des services concernés du Canton pour leur fils puisse intégrer un cursus sit SAF, pour « Sport-Art-Formation ».
La réponse, avec la signature du conseiller d’Etat Jean-Pierre Siggen, a consisté à accorder « généreusement » cinq journées de congé pour toute l’année scolaire 2021-2022. Congés déjà tous pris, bien sûr, pour la fin de la saison sportive 2021! Et de toutes façons bien insuffisants.
Les «Talent Cards» , une solution?
Selon le Canton de Fribourg, le problème viendrait du fait que le motocyclisme n’est « pas reconnu » par l’association Swiss Olympic, parce que la Fédération concernée (dans ce cas la Fédération Motocycliste Suisse, la FMS) n’a pas mis en place de programme de détection et sélection des futurs sportifs d’élite, passant par l’attribution d’une «Talent Card».
Or, selon Claude Clément, vice-président FMS en charge du sport, c’est au moins partiellement faux. Un tel programme existe, et a d’ailleurs déjà été utilisé par quelques jeunes pilotes de Suisse. Les premières Talent Cards ont été attribuées ce printemps. Mais pour l’instant, cela concerne uniquement le domaine du motocross. Un sport pour lequel il existe des circuits utilisables et utilisés en compétition en Suisse, contrairement au motocyclisme comme sport de vitesse. Là, la Suisse se distingue pour l’instant encore par une interdiction ancrée dans une loi de pratiquer tout sport motorisé de vitesse, depuis les années ’70. Bien que le parlement suisse soit actuellement en train de débattre de la levée de cette interdiction (lire notre article).
« Il est prévu de mettre sur pied un programme similaire pour les disciplines de vitesse, mais cela va prendre un peu plus de temps, confie Claude Clément. Ce ne sera pas pour 2023. Par contre, il y a toujours la possibilité d’attribuer une carte de sportif d’élite. » Comprenez, à un pilote adulte, non concerné par l’encouragement de la relève sportive.
Cela a déjà été une solution utilisée faute de mieux par le passé. Par exemple pour feu le regretté Jason Dupasquier, un jeune Fribourgeois qui a débuté sur la scène mondiale en étant le seul Suisse sélectionné dans la Red Bull Rookie’s Cup, puis qui a pu intégrer un team du mondial Moto3, avant de malheureusement perdre la vie lors d’un incident survenu pendant les qualifications pré-course au Mugello, en Italie.
Selon Swiss Olympic, pour qu’un jeune pilote reçoive une carte Elite, il faut que la FMS en fasse la demande, en certifiant que le pilote en question ne participe plus à un championnat axé sur la relève.
La famille Nestola, elle, n’avait jusqu’ici jamais entendu parler de cette possibilité d’obtenir une carte Elite, et apparemment, les services du canton de Fribourg non plus. Il est de toutes façons trop tard, cette année, pour Kylian. Mais qui sait, pour 2023…
Si vous voulez en savoir plus sur le championnat européen Superstock 600, vous pouvez consulter (en anglais ou en espagnol) le site du Junior GP (agréé par la Fédération Internationale de Motocyclisme). Et pour suivre les courses en direct, il y a la chaîne YouTube du Junior GP.
Je trouve scandaleux qu’il ne peuve pas faire d’arrengement