Essai – Le Chang Jiang Siberian Express, moins d’effort pour tourner, autant de charme
La marque chinoise Chang Jiang, qui est l’une des rares à proposer en Europe des side-cars routiers produits en série, a mis à jour sont modèle Pekin Express (650), devenu Siberian Express 700. Avec un moteur plus puissant, une fourche à balancier plus sophistiquée augmentant le confort de roulage et la facilité de pilotage, et diverses autres petits plus. Mais le plus important, prendre place au guidon ou dans le panier est toujours une expérience aussi sympathique sur cette nouvelle version.
Essayer un side-car, ce n’est pas quelque chose que nous faisons tous les jours à la rédaction d’ActuMoto.ch. Mais lorsque notre partenaire de notre Annuaire des pros de la moto Moto-Addict nous a annoncé que ChangJiang sortait une mise à jour importante de ses modèles pour 2024, baptisée Siberian Express, et que nous avons constaté qu’il n’y avait quasiment pas de matériel photo disponible pour juste en faire une actualités sur notre site, nous nous sommes dit qu’il était temps de nous installer au guidon et dans le panier.
Nous avons déjà eu l’occasion de tester le ChagJiang Pekin Express, la version précédente, et nous avions été conquis par l’originalité de ce véhicule (lire le test réalisé par un des membres de notre rédaction qui n’est plus chez ActuMoto).
ChangJiang, on le rappelle, est l’une des rares marques qui propose des side-cars de route produits en série en Europe, avec Mash et, plus récemment, Shineray. Ils sont tous fabriqués en Chine (et conçus en France pour Mash).
A l’origine, ChangJiang, qui fabrique des sides depuis plus de trente ans, a utilisé des moteurs russo-allemands (comme ceux de la marque russe Ural), et plus récemment, ce constructeur chinois a choisi des moteurs bicylindres Kawasaki disponibles dans le pays grâce à un accord de production sous licence. Les mêmes twins que l’on connaît bien dans les Kawasaki Er-6n, entre autres. Enfin presque.
Le Siberian Express, dit aussi Siberian Express 700, va un peu plus loin. La cylindrée (693 cm3) est plus grande, et l’engin n’est plus bridable à 35 kW pour les exigences du permis A limité (catégorie A2). Parce que oui, il faut un permis moto pour conduire ce genre d’engin, même si ce genre d’engin ne se conduit pas du tout comme une moto.
Les autres changements sont une nouvelle fourche en guise de suspension avant, qui n’est plus du genre classique télescopique, mais à balancier, un siège plus haut dans le panier, un tableau de bord digital et partiellement tactile et deux ou trois autres bricoles, comme dirait certainement « Dan », le patron de Moto-Addict, à Moudon (VD).
C’est le soussigné, cofondateur du média ActuMoto.ch et responsable de ce même média, qui s’est dévoué, et qui a par conséquent demandé à Christine, la femme et associée de Dan, de lui donner un petit cours pratique de raffraîchissement avant de pouvoir sillonner les routes du pays de Vaud avec le nouveau Siberian Express. Il (je) n’avait eu que l’occasion de rouler sur quelques dizaines de kilomètres à bord d’un Pekin Express lors d’une journée porte ouverte de Moto-Addict (en 2022), avec un passager. Cela s’était bien passé, mais l’expérience avait laissé le souvenir d’une machine un rien instable sur une route avec un revêtement pas impeccable, surtout pour un side-cariste totalement inexpérimenté.
En gros, s’il n’y a pas de différentiel pour la troisième roue, celle du panier, un side est presque par nature instable, du fait des différences de vitesse entre la roue arrière motrice de l’élément moto et la roue du side, qui est juste entraînée par la liaison du panier à la moto.
Si on accélère (panier à droite), l’avant du side-car a tendance à pivoter vers la gauche, et il faut donc tourner le guidon dans l’autre sens pour corriger. Et si l’on freine, c’est le contraire, ce qui fait qu’il faut corriger en tournant le guidon dans l’autre sens.
Il y a aussi les effets de la force centrifuge, qui sont différents de ce que l’on vit sur une moto, parce qu’on ne peut pas se pencher dans les virages, à cause des trois roues. On fait tourner l’engin beaucoup plus avec le guidon, et donc avec le haut du corps. Si la vitesse de passage en courbe est élevée, il faut même une certaine force pour y arriver. Et dans un virage à droite (du côté du panier), au delà d’un certain nombre de km/h, on risque de faire levier le panier. Ce qui est assez flippant, il faut bien l’avouer, même si la plupart du temps ce n’est pas vraiment dangereux.
Christine nous rappelle tout cela d’abord sur un parking désert dans la zone industrielle et artisanale de Moudon, puis sur un parcours d’une vingtaine de kilomètres autour de la cité broyarde. L’occasion de vérifier qu’il y a de très jolies routes dans cette région (Moto-Addict propose des balades touristiques en tant que passager, se renseigner chez eux ou à l’office du tourisme), et de jauger les vitesses « acceptables » à bord du Siberian Express.
Ce premier contact fait déjà comprendre que le nouveau Siberian Express est en fait plus facile à conduire que son prédécesseur, le Pékin Express (et son frère le Dynasty), que j’avais brièvement essayé . La fourche à balancier, qui déporte la roue avant vers l’aavnt par rapport à l’axe de direction, fait qu’il faut exercer moins d’effort pour diriger l’engin.
On sent bien des oscillations à l’avant, mais du fait de la géométrie du Siberian Express, elles sont contenues et ne changent pas la trajectoire. Il n’est donc pas moins stable que les modèles précédents de ChangJiang.
Sinon, il faut vraiment désapprendre un certain nombre de réflexes acquis au guidon des motos, comme celui de profiter de la force centrifuge pour « asseoir » le véhicule en virage. Avec le side-car, cette force ne s’exerce pas vraiment de manière perpendiculaire à l’axe de la roue. On a plutôt l’impression, comme sur une voiture, d’être tiré vers l’extérieur sur un axe horizontal.
On valide aussi pleinement lors de ce premier contact la marche arrière, quasi indispensable sur un engin de ce genre. Elle est très facile à utiliser. A l’arrêt, boîte au point mort, il suffit de tirer un levier mécanique sur la partie gauche du guidon, puis de mettre la première (qui est en dessus du point mort), et de tourner l’accélérateur. Puis de faire la même chose mais à l’envers pour se remettre en marche avant.
Il faut par contre être attentif à desserrer à chaque fois le frein de parking (levier mécanique sur la partir droite du guidon). Il empêche le side de bouger à l’arrêt, et ça c’est bien. Mais le poids du véhicule et le couple du moteur font qu’on peut quand même avancer (ou reculer) si l’on n’a pas desserré ce frein, et ça c’est moins bien, car cela risque de le rendre inopérant à la longue.
Avec les derniers conseils de Christine en tête, me voici en route pour Lausanne, en ligne droite, sur la route cantonale. Jusqu’à la vitesse légale autorisée (80 km/h, même si peu de gens la respectent sur cette artère de communication très empruntée), le Siberian Express est étonnamment stable pour un side-car.
Autre constat, le nouveau moteur de 693 cm3 (au lieu de 649) est plus costaud et ça se sent. Le surplus de couple fait qu’on peut rouler à la vitesse limite sans trop stresser le bicylindre en ligne. Une information intéressante: ce moteur revu est en fait produit par le géant chinois CFMOTO pour ChangJiang. Et à part la démultiplication et la boîte (quatre vitesses, plus la marche arrière), c’est en gros le même bicylindre que celui qui équipe par exemple la nouvelle Moto Morini Calibro (lire notre test). Globalisation, quand tu nous tiens!
Le couple plus important que sur le moteur 650 est aussi un plus côté vibrations, parce qu’il y en a pas mal dès qu’on arrive dans le dernier tiers du compte-tours. Ca brouille un peu la rétrovision, et ça délivre un massage qui n’a rien à envier à une séance chez un ou une professionnel/lle.
Le vrai gros plus de ce Siberian Express, c’est l’effet qu’il produit sur les passagers et passagères potentiels! Des personnes qui hésiteraient à monter derrière vous sur une moto pour aller faire un tour ont soudainement moins d’arrière-pensées à l’idée de prendre place dans le panier pour une sympathique balade.
Ils ou elles sont même prêts à mettre un casque sur la tête, une veste et un foulard (à cause du fait que le pare-brise optionnel n’est pas monté) et à trouver comment attacher la ceinture de sécurité qui fait partie de l’équipement de série!
Nous avons pu prendre en charge trois passagers. Deux motards, dont un s’est prêté au jeu des photos, et une non motarde mais qui n’est pas totalement étrangère à ce monde. Dans les trois cas, ils avaient le sourire après la balade, même si l’un d’entre eux a avoué que l’on ressentait très bien les imperfections de la route. A sa décharge, nous avions emprunté une toute petite route, pour monter au sommet de la dent de Vaulion – rouleaux en métal anti-vaches sur la chaussée inclus dans la balade.
C’est là toute la magie de ce side-car, et d’autres. Rouler avec demande en fait plus d’effort au (ou à la) pilote qu’à son passager. Nous n’avons pas testé à trois, bien qu’il y ait une selle passager du côté moto du Siberian Express. C’est possible, bien sûr, l’engin est fait pour cela, mais cela empêcherait d’avoir ce look « Wallace et Gromit » en roulant à deux.
Pour ce qui est du poste de timonier, le seul vrai effort, si on adopte un rythme de balade et pas de course, c’est de bien garder à l’esprit la largeur du véhicule, tout particulièrement dans les virages à droite. Ne pas trop couper ces virages-là, sous peine de réveiller le ou la passagère.
Le contrôle de l’accélération est simple et très intuitif. L’injection est bien calibrée et on obtient toujours exactement ce qu’on a demandé. La sonorité sortant des deux pots est même assez agréable et grave.
Les premières dizaines de kilomètres, on tente de comprendre à quoi peut bien servir le bouton rouge très explicite posté sur la partie gauche du guidon. On fait des hypothèses: il devrait servir à changer de mode de pilotage, de sportif à normal, ou de normal à adouci.
Et on se persuade de sentir une différence quand on appuie sur ce bouton … mais en réalité il ne sert strictement à rien! du moins pas sur les modèles importés en Europe. C’est le pouvoir de la pensée …
Pour le reste, les commandes sont bien placées, que ce soit aux mains ou aux pieds. On est assis en position droite sur la selle et on ne doit pas tendre les bras de manière inconfortable pour manier le guidon.
L’embrayage et le frein avant sont à portée de doigts, même pour quelqu’un qui, comme l’auteur de ces lignes, a de petites mains. La pédale de frein tombe naturellement sous la pointe de la botte gauche, et celle du sélecteur sous ou sur la botte de droite. Il y a même un levier arrière pour passer les vitesses avec le talon, comme sur une moto américaine!
La position de conduite est assez naturelle, sauf qu’il faut vraiment bien mettre son séant en arrière sur le siège façon vélo. La selle est amortie, ce qui est appréciable. Mais sa forme est particulière, et si on ne se met pas bien en arrière, on risque assez vite d’avoir mal à l’intérieur des cuisses.
Les dimensions des roues, soit 19 pouces à l’avant, pouces pour les deux autres, ajoutent à l’effet amortisseur des suspensions, des ressorts sous les selles et du rembourrage du siège passager (qui est plus haut sur cette nouvelle version que sur le Pekin Express).
Mais même ainsi, les suspensions sont quand même parfois un peu sèches. On ne peut pas les régler, à part la précharge des amortisseurs arrière. Si le revêtement est lisse, ça passe crème. Si c’est bosselé, on fera bien de réduire un peu l’allure.
Mais une particularité de cet attelage est d’être prêt au sortir d’usine à des excursions en tout-terrain. Avec trois roues, des pneus mixtes dotés de bons crampons et une marche arrière, on passe quasiment partout.
Il est bien sûr exclu de sauter par dessus un tronc, et nous n’avons pas testé de parcours exigeant en enduro. Mais sur une piste sèche ou mouillée, il n’y a aucun problème particulier. C’est même plus sûr qu’une moto.
En cas de pluie, on peut bâcher le panier, mais seulement si personne n’y a pris place. Sinon, c’est comme sur une moto. Mais avec plus d’adhérence, du fait des trois roues.
Au freinage, qui est combiné (frein arrière et freinage de la roue du side), pas de souci. On a bien assez de puissance, et c’est progressif. Ici aussi, avoir trois disques de frein au lieu de deux aide. Ne pas oublier de contre-braquer sur la droite, de manière proportionnée à la force de freinage.
Un aspect souvent invoqué à propos du side-car, c’est son caractère sociable. Et c’est vrai. Dès qu’on s’arrête et qu’on rencontre quelqu’un, il y a de fortes chances que l’interaction soit agréable. L’engin sur lequel vous vous trouvez, avec en plus son côté visuellement rétro, suscite la plupart du temps la sympathie et provoque la discussion.
Comme sur le modèle précédent, l’autoroute n’est pas le lieu de prédilection de ce Siberian Express 700, à une précision près: le nouveau moteur fait qu’on peut atteindre facilement les 100-110 km/h sans avoir l’impression de forcer la marche. Le ChangJiang reste stable à ces vitesses et le bicylindre ne force pas ses régimes en quatrième.
Le coffre placé à l’arrière du panier donne une bonne capacité d’emport (deux casques sans problème), et il est verrouillable avec la clé de contact. La manoeuvre de verrouillage et de déverrouillage est cela dit assez peu intuitive et on court le risque, si on l’exécute un peu vite, de tordre la clé.
Quant au nouvel afficheur digital, il perd peut-être un peu de charme. Mais il est bien lisible, quelle que soit la luminosité ambiante. On n’a pas des tonnes d’informations, mais c’est largement suffisant.
Il est même possible de connecter le véhicule avec un smartphone, si l’on arrive à installer et configurer l’app ChangJiang, dont certains menus sont … en chinois. Quand c’est fait, on a droit à des notifications d’appel avec le nom de celui ou celle qui vous appelle directement sur l’écran du side-car.
La présence d’une roue de secours au sommet du coffre fait partie du charme de ce Siberian Express. Et il y a encore des bouts de porte-bagage disponibles pour arrimer des bagages. Autrement dit, cette machine est plutôt indiquée pour un tour du monde à deux, surtout si l’on ajoute que le moteur d’origine Kawasaki-CFMOTO est une donnée connue et fiabilisée depuis longtemps.
Les services sont conseillés tous les 6000 km (bien plus de km pour le contrôle des soupapes) et ne coûtent pas plus cher que sur une moto.
Le prix de presque 18000 (17900) francs n’est pas donné. Il est en tout cas plus cher que pour le Pekin Express et le Dynasty, qui eux-mêmes ont vu leur prix évoluer vers le haut ces deux dernières années.
Attention aussi quand vous vous parquez sur la voie publique. On peut garer un side routier sur une place moto, si elle n’est pas délimitée de manière individuelle – sur une zone de pavés pour les deux-roues, par exemple. Dans les autres cas, il faut viser une place pour les autos, et payer le parking en conséquence. Cela dit, nous nous sommes parqués durant plusieurs jours au centre de Lausanne sur deux places moto, et personne n’y a trouvé à redire.
On peut par contre témoigner du fait que la qualité de fabrication est correcte et que ce Siberian Express est à première vue assez robuste. Et puis pouvoir prendre plusieurs cartons de raffraîchissements dans le panier avec l’air sur le visage quand on roule et de nouveaux amis à chaque arrêt, cela n’a pas de prix!
Pour en savoir plus, vous pouvez consulter le site helvétique de la marque Changjiang, ou vous adresser à nos partenaires de notre Annuaire ActuMoto des pros de la moto, Moto-Addict à Moudon (VD), qui est aussi l’importateur de la marque en Suisse, et le Garage des Grives à Granges-Paccot (FR).
Je vais vendre mon Pékin express et je vais commander
Le sibérien 700
Suis tout à fait d accord avec compte-rendu
Bravo, volontaire
Pour information sur un side quand on accélère deça tire à droite (poids mort du panier) et quand on freine ça tire à gauche (pour la même raison) quand on ne sait pas sinon une fois que l’on a assimilé, un Side bien réglé se conduit d’une seule main Uralement votre
OK erreur dans le commentaire mais a part çà, suis d accord