Notre journée sur le bitume vaudois, pour goûter au rallye routier
Nous nous sommes inscrits à une journée découverte organisée par le Team Rallye Routier Suisse, dont les membres participent chaque année à plusieurs rallyes chez nos voisins français. Au menu, présentation de la discipline, et surtout exercices pratiques de lecture de Roadbook en roulant. Une expérience qui donne envie de se lancer dans l’aventure!
Encore 2,3 kilomètres et il faudra tourner à gauche… c’est ce que dit le roadbook que je tente maladroitement de dérouler dans le lecteur mécanique installé sur le guidon de ma moto, un accessoire indispensable pour s’adonner aux joies du rallye routier.
Je contrôle aussi le kilométrage total et le compare avec celui de l’odomètre de la moto, tout en gardant un oeil attentif sur la route, qui est humide et sale – mon pneu arrière est rincé. Une route qui n’est d’ailleurs pas très large. Et je ne sais pas si je l’ai mentionné, mais il pleuvine.
Nous sommes en pays de Vaud, quelque part entre le pied du Jura et la plaine de l’Orbe, en train de découvrir les bases de la discipline durant toute une journée, avec l’association Team Rallye Routier Suisse (TRRS), qui a mis sur pied cet événement destiné à faire découvrir le rallye routier à de nouveaux pilotes.
Quand on parle de rallye routier, en général, on imagine plutôt quelque chose avec des véhicules à quatre roues, mais la discipline existe bien sûr aussi pour les motos, et de l’autre côté de la frontière franco-suisse, elle est bien vivante. Il y a un certain nombre de pilotes suisses qui donc participent chaque année au championnat français, ou qui prennent part à l’une ou l’autre épreuve incluse dans ce championnat ou hors championnat.
Morgane Hannigsberg et Antoine Asfaux, membres de l’association TRRS, sont parmi ces pilotes. Pour mieux partager ce qui est presque devenu une addiction pour eux, ils ont organisé cette une journée de découverte du rallye routier dans le canton de Vaud, samedi 22 avril dernier, avec l’aide notamment de membres de l’association.
C’était le deuxième événement de ce genre mis sur pied par TRRS. Vingt places étaient disponibles pour participer à cette journée 2023, qui débutait à l’Auberge communale de Ballens, pas loin de Bière. Nous en étions donc, histoire de faire découvrir ce sport à un plus large public motocycliste!
La découverte a commencé par une (courte) partie théorique. Il s’agissait d’expliquer les règles des rallyes routiers. Le fait que les parcours sont divisés en étapes régulières et en « spéciales ». Ces dernières se déroulent en principe sur route fermée, sont chronométrées, et c’est le temps qui détermine le classement, par catégorie. Les plus rapides sont les mieux classés.
Les autres parties du parcours sont aussi chronométrées, mais là c’est la précision qui est récompensée. On a une heure de départ à chacun des points de chronométrage et de timbrage du carnet de rallye, à la seconde près, et un écart de plus de 30 secondes expose à des pénalités, plus ou moins importantes selon l’écart. Et il y a une heure d’arrivée au point suivant, avec les mêmes règles.
Ce parcours se fait en suivant les indications d’un lecteur de roadbook. Les concurrents et concurrentes reçoivent en effet une sorte de parcours fléché sur papier (ou dans certains cas, sous forme électronique), indiquant les kilomètres et centaines de mètres séparant un point de l’itinéraire du suivant. Et ce parcours ne leur indique que les passages où il faut changer de direction. Ou plus exactement, ceux où il faut prendre une décision parce que l’itinéraire n’est pas évident.
« Si l’on reste sur la route principale, le roadbook ne dit rien, même si la route serpente dans tous les sens ou si elle croise plein de petites routes », explique Antoine. Et selon les régions dans lesquelles se déroule le rallye, il peut devenir difficile de distinguer les routes principales des secondaires! Une règle de ce genre d’épreuve est aussi qu’il faut respecter le code de la route, et notamment les limitations de vitesse. « C’est faisable, note Morgane. La moyenne horaire, en général, est de 50 à 60 km/h. Si vous vous faites arrêter pour infraction, cela vous vaut là aussi des pénalités. »
Le reste de la journée s’est passé sur la route, par petits groupes de motocyclistes, chaque groupe étant accompagné d’un pilote habitué du rallye routier, et les membres du groupe faisant chacun une partie du trajet avec un lecteur de roadbook manuel, en ouvrant la voie sous la supervision attentive du pilote habitué.
Nous avons ouvert la voie avec le roadbook pour la seconde partie de l’itinéraire du matin, avant la pause repas.
A l’ère du tout électronique, il faut d’abord se souvenir que c’est au (ou à la) pilote de dérouler son roadbook papier, à la main et en roulant, au fur et à mesure de son avancement sur l’itinéraire. Les passages dans les petites localités ne sont pas toujours évidents. Et si la section du roadbook concocté par l’équipe de TRRS pour la matinée était plutôt « gentille », il y avait tout de même quelques pièges!
Les premiers kilomètres furent un peu hésitants. Et ce alors même que l’auteur de ces lignes connaît bien la région choisie, qui oscillait entre le pied du Jura vaudois et la plaine de l’Orbe! L’équipe de TRRS avait même mis en place des « contrôles de passage » inopinés où l’on devait faire « timbrer » les carnets de rallye d’exercice fournis par Morgane et Antoine. Il s’agit d’arrêts obligatoires mais non annoncés, qui servent à vérifier que les concurrents passent bien par tout l’itinéraire, et dans le bon sens. « En situation de rallye routier, on a la plupart du temps en plus un transpondeur permettant de vérifier les heures de passage aux points de chronométrage », ajoute Antoine.
Si notre groupe, suivi par Antoine, a peu cherché son chemin le matin – on dit « jardiner » dans le jargon des rallyes – il n’en a pas été de même de tous les groupes. Certains ont commencé à jardiner dans les parages des Clées, d’autres s’y sont mis avant.
Le sous-signé s’est assez bien débrouillé, jusqu’au moment où il a proprement loupé le restaurant sur sa droite sur la route principale à Chavornay (restaurant La Croix Blanche, par ailleurs excellent), pourtant dûment indiqué sur le roadbook! Et il a récidivé en début d’après-midi juste après un point de contrôle en zone résidentielle à Cossonay, interprétant mal la flèche sur le roadbook, qui signifiait qu’il fallait tourner à droite APRES le point de contrôle, pas tourner à droite pour se rendre au point de contrôle…
Les jardinages se sont faits plus nombreux l’après-midi, dans les environs d’Etoy. Normal, les pièges eux aussi étaient plus nombreux, afin de donner aux participants et participantes l’occasion de faire leur apprentissage de manière progressive.
L’itinéraire nous a fait passer par beaucoup de petites routes. Ce qui est tout à fait représentatif d’un rallye routier tel qu’il existe en France. Sur ces voies, souvent étroites, il n’est pas toujours possible de rouler vite et les croisements ne sont pas toujours simples. Nous avons même rencontré une déviation pour cause de chantier, dans les hauteurs près d’Etoy, mais elle n’a pas bouleversé le décompte kilométrique.
Et comme la moto que nous utilisions pour cette journée découverte était une Ducati Streetfighter V4 (lire notre essai de la dernière version de ce modèle) prêtée par un collègue, il a fallu faire le plein juste avant la fin de l’itinéraire (environ 130 km), pour ne pas risquer de tomber en panne sèche à quelques kilomètres de notre oasis du pied du Jura – l’Auberge communale, pour ceux et celles qui n’ont pas l’âme d’un poète.
« Si on suit le roadbook indiqué, en général, tout va bien, commente Antoine. Si on se trompe, il vaut mieux revenir au dernier point de passage dont on est sûr. Mais là, ça se complique. Il faut d’abord tout recalculer, pour les kilomètres. Et il est difficile de rattraper le temps perdu. »
Notre exercice de découverte se faisait sans que le temps ne compte. Mais à titre indicatif, l’équipe de TRRS nous a tout de même minutés. En conditions réelles, nous aurions tous eu droit à plusieurs pénalités.
« La difficulté, c’est effectivement la combinaison des pièges du roadbook avec les temps de passage à respecter, et sur certains rallyes, on roule aussi de nuit, ce qui corse encore la chose », commente Antoine.
Il ajoute que l’offre en rallyes chez nos voisins de l’Hexagone est riche et intéressante, et que cette discipline ne coûte pas trop cher pour qui veut la pratiquer. On peut le faire avec sa moto personnelle, à laquelle il faut juste ajouter un lecteur de roadbook, qu’il soit manuel, à défilement électrique, ou électronique. Et selon les motos, un éclairage additionnel pour les épreuves nocturnes.
Il y a encore les frais d’inscription, une licence à l’année ou pour une épreuve à prendre auprès de la Fédération française (FFM), qui inclut une couverture RC, l’essence, et le trajet pour y aller. Comptez entre 500 et 600 francs par rallye et par personne, en moyenne.
Dans le calendrier, il y a des rallyes qui comptent pour le championnat français, comme celui de Charente, celui de la Sarthe ou celui du Dourdou, et d’autres, comme celui des Volcans (en Auvergne) ou le Challenge Tour (en Bourgogne, autour du circuit de Vaison) qui sont hors championnat. Le prochain est celui de la Sarthe, les 6 et 7 mai 2023. Le Challenge Tour, lui, qui inclut une spéciale sur le circuit de Vaison, a lieu les 26 et 27 mai.
Les participants sont classés dans des catégories, selon le type de moto, ou même de scooter (c’est possible!) ou de side-car. Et il y a des trophées spéciaux, dont le Trophée européen, qui s’adresse en particulier aux personnes venant d’ailleurs que la France. Comme par exemple les petits Suisses! Antoine et Morgane se sont ainsi classés premier et deuxième de ce trophée en 2022, et Morgane était deuxième du trophée féminin.
Pour en savoir plus sur le rallye routier français, vous pouvez consulter le site consacré au rallye routier de la FFM. Ou vous adresser à l’association TRRS, via sa page Facebook, ou son profil Instagram. Vous pouvez aussi contacter Antoine Asfaux par mail.
Merci Jérôme pour ce bel article !
J’ajouterai que le rallye routier est accessible à toutes et tous, quel que soit votre niveau, du moment que vous possédez une moto et que vous aimez rouler ! L’ambiance du paddock est bienveillante avec des airs de Continental Circus, et le Team Rallye Routier Suisse est là pour vous aider à mettre le pied à l’étrier (ou plutôt sur le cale-pied). N’hésitez pas à nous contacter et à vous lancer !
Le rallye routier, la course sur route à l’état pur !