Essai moto de rallye – La Kove 450 Factory, pour bien entrer dans le monde du rallye-raid
Une vraie moto de rallye taillée pour le Dakar, même d’occasion, coûte facilement plus de 25000 francs. Mais de nouveaux constructeurs, dont le chinois Kove, proposent des modèles spécialisés à des prix plus qu’intéressants. Nous avons fait tester aux pilotes du team suisse Edelweiss Racing, dans une carrière mise à disposition par nos partenaires de la Cornu Master School.
Elle s’appelle Kove 450, et c’est peu dire qu’elle a fait parler d’elle dans le petite monde des fanas de rallye moto, depuis son arrivée sur le marché en 2023.
Cette moto est une vraie machine de rallye, proposée en deux versions. La Kove 450 Rally est homologuée pour la route et coûte la somme de 9990 francs, ce qui est presque dérisoire pour une 450 de rallye-raid. La Kove 450 Factory n’est pas homologuée, mais elle est par contre prête à affronter les dunes, et coûte 15000 francs tous ronds.
On trouve la première chez les revendeurs Kove passant par l’importateur suisse Mosport, et la seconde en passant par notre partenaire (Annuaire ActuMoto des pros de la moto) SP Racing, à Moudon.
Une « vraie moto de rallye », tout équipée avec ses gros réservoirs d’essence, un filtre à air haut de gamme, sa tour de navigation etc., cela coûte au moins 25000 francs. Voir plus de 35000 si l’on opte pour une Replica de KTM. Même d’occasion.
Deux marques ont investi récemment ce marché avec des machines nettement meilleur marché: Fantic Motor, en Italie, avec la XEF Rally (lire notre essai en enduro) et la XEF Factory, et, justement, le chinois Kove.
Ce dernier a déjà engagé plusieurs 450 Factory en compétition. Et pas n’importe où. Dans le plus dur de tous les rallyes-raids reconnus comme comptant pour le championnat mondial de la discipline, le Dakar. Ces Factory ne sont pas toutes arrivées au bout sans pépins, mais elles ont prouvé qu’elles en sont largement capables.
Pour les pilotes lambda, cette Kove 450, est-elle une proposition intéressante, au-delà de son prix? Comme chez ActuMoto nous ne comptons pas (encore) de pilote de rallye dans notre équipe de journalistes-essayeurs, nous avons à nouveau lancé une opération commune avec les pilotes du team suisse Edelweiss Racing, une structure fondée il y a déjà quelques années par le Neuchâtelois Nicolas Monnin, finisseur du Dakar. Comme nous l’avions déjà fait pour la Fantic XEF Rally.
Notre terrain d’essai était une gravière, aimablement prêtée par notre partenaire, la Cornu Master School, spécialiste suisse de la formation continue au pilote moto, sur tous les terrains. Cet environnement permet d’évoluer à basse ou haute vitesse sur des terrains variés, rendus glissants en début de journée par une pluie la veille au soir. Il ne manquait que les dunes de sable, un peu simulées pour l’occasion par les gros tas de gravier ou de terre placés dans un coin de la gravière.
Quatre membres du team Edelweiss étaient présents dont deux, Lucas Secco et Meydi, ont soit déjà pris part à des rallyes dans le désert, soit ont le projet de se frotter à cet environnement très prochainement. Etait également de la partie Nicolas Monnin, et Elliott, un jeune pilote avec un peu moins d’expérience.
Nicolas avait aussi amené son ancienne KTM Replica (450, de 2012), avec laquelle il a déjà fait plusieurs rallyes, dont le Dakar en Amérique du Sud (2016), et sa plus récente Honda de rallye (450, de 2020), la machine avec laquelle il est arrivé au bout du Dakar en Arabie saoudite, en 2022.
Pour la précision, ce qui distingue la Kove 450 Factory de la Kove 450 Rally, à part la non homologation pour la route et le prix plus onéreux de 5000 francs: la Factory donne plus de chevaux et de couple, elle est déjà équipée avec une « tour » de rallye à l’avant, pour le lecteur de roadbook, ainsi qu’avec un échappement en titane (au lieu d’un en inox), avec un réservoir d’eau, avec des protège-mains Factory (offerts cela dit sur la Rally chez SP Racing), des vis en titane, un amortisseur de direction racing, et une protection de frein arrière en carbone.
Voici les impressions de Lucas, qui a testé aussi bien la Kove 450 que la Honda CRF 450 X Rally (créée par un spécialiste italien à partir d’une machine d’enduro), et qui dit lui-même être un enduriste et n’avoir « jamais mis les fesses sur une moto de rallye avant ce test comparatif. »
Lucas: « la Kove 450 est parfaite pour débuter dans le monde du rallye »
« La Kove est très maniable, légère, les commandes sont faciles à utiliser. Elle n’est pas brutale ni agressive, mais docile. Le moteur ne m’a pas surpris. J’ai l’habitude des 250 de cross, je craignais que cette Kove 450 ne m’arrache les bras, mais ça n’a pas du tout été le cas. »
Le terrain était au départ bien glissant, le sable et la terre de la gravière étant encore gorgés d’humidité après des pluies la veille au soir. « Il y avait de l’appréhension au début, raconte Lucas. Puis le terrain s’est amélioré et j’ai pris confiance. J’ai eu une glissade de l’avant, mais que j’ai pu récupérer assez facilement. Cette moto permet des erreurs. »
La Honda, en comparaison: « le châssis est totalement différent, les suspensions sont plus rigides, et avec le moteur rageur, cela donne envie d’aller encore plus vite. Mais cela demande aussi plus d’expérience et de finesse. Le moteur de la Kove monte moins vite dans les hauts régimes, il a moins de chevaux, et les rapports de vitesses sont un peu plus courts. On roule naturellement moins vite qu’au guidon de la Honda. Par contre la Kove 450 est plus facile quand on veut changer de rapport. »
« La Honda devient presque plus stable au fur et à mesure que l’on prend de la vitesse, continue-t-il. Sur la Kove, l’arrière de la moto sautait. Il y a des différences bien perceptibles au niveau des suspensions. Pour le reste, le freinage et la position de pilotage, il ne constate pas de grosses différence. « La Kove est bel et bien conçue comme une moto de rallye.
Pour lui, la Kove 450 est parfaite pour débuter dans le monde du rallye: « On ose plus mettre du gaz, on va au final moins vite et moins fort, mais on a aussi plus de temps pour voir les obstacles devant. La Kove, c’est un peu la sagesse, et la Honda la fougue. Je me suis fait peur quelques fois avec la Honda. La Kove est à la portée de beaucoup plus de monde. »
Meydi: « compétitive en rallye, juste avec quelques petites modifications »
Meydi, contrairement à Lucas, a déjà pris part à un rallye moto dans sa jeune carrière, et il a eu l’occasion, avant notre test dans la gravière, de brièvement essayer les deux versions de la Kove 450, sur une petite piste de motocross (au CPRP, à Moudon).
« En comparaison avec la KTM, la Kove est très facile, et son ergonomie est bien meilleure. De ce point de vue-là, je ne vois pas mieux, à part peut-être les KTM Replica les plus récentes. Par rapport à la KTM de 2012, je me sentais plus à l’aise. La Kove 450 m’a semblé plus maniable, plus légère, ils ont bien bossé pour le placement du centre de gravité. Les suspensions jouent aussi un rôle. »
Et à propos des suspensions, il les trouve « un peu trop souples d’origine » et avoue être arrivé au bout du débattement de la fourche lors de freinages forts ou de sauts. « Mais pas comme sur la Fantic (ndlr: Meydi faisait partie des trois pilotes du team qui s’étaient livré au test de la Fantic pour ActuMoto), où ça tapait. Ici, sur la Kove, ça stoppe juste le mouvement. »
« La fourche est un peu trop souple à mon goût, et l’assiette de la moto un peu trop sur l’avant. J’avais une impression de manque de stabilité en roulant vite. En roulant à 100 à l’heure, elle déviait de sa trajectoire. Et moins qui suis grand (ndlr: 1m90), j’avais aussi l’impression que la Kove était petite, avec un guidon proche des cale-pieds. » Mais par contre la finesse de la chinoise à l’entre-jambes est saluée.
Le freinage « manque juste un peu de feeling, avec un levier assez dur, et peu de course disponible. » Il ajoute que « plus le terrain est dur, plus on a d’adhérence, et moins ce ressenti est gênant. » Et précise qu’il n’a rien à redire par contre pour le freinage à l’arrière de la moto.
« Le moteur de la Kove manque un peu de puissance dans les tours, surtout si on le compare à celui de la KTM, mais cela ne m’a pas du tout gêné. C’est même un plus, on ne doit pas tout le temps gérer la délivrance de la puissance, on va moins devoir se poser de questions en roulant. Cela dit, on peut aussi moins rouler sur le couple. Et il y a parfois de petits à-coups d’injection bas dans les tours qui ne sont pas agréables dans les premiers rapports. »
« Cette 450 s’adresse à un public large, elle ne demande apparemment pas beaucoup d’entretien, et on peut aussi l’utiliser en compétition. En plus elle n’est pas chère. Avec de petites modifications, on pourrait être compétitif dans un rallye. La KTM, elle, sous sa dernière forme, est parfaite, mais elle est à 35000 francs! »
Nicolas: « la maniabilité de la machine est parfaite, la moto est très joueuse et accessible »
« Le team Edelweiss Racing s’est donné pour mission de faciliter l’entrée dans le monde du rallye pour les amateurs. Dans ce domaine, deux écueils en lien avec la moto existent, le coût d’achat ou de location et aussi le tempérament très sportif des machines actuelles. Ces 2 barrières viennent de tomber avec cette Kove de rallye. Grâce au tempérament moins violent de son moteur et à son prix défiant toute concurrence, c’est l’outil idéal pour lancer ses pilotes débutants dans les aventures des rallyes-raids. »
« Avant même de rouler, on est bluffé de la qualité générale de la moto. Les matériaux sont de qualité et la conception générale qui s’inspire de qui on sait est bien sûr très intéressante. Il est notamment question ici de châssis solide et d’aptitudes pragmatiques pour l’entretien de la machine en bivouac lors des compétitions notamment. »
Il note des points qui méritent selon lui un examen plus poussé, dans le domaine de la résistance aux chocs des commandes, leviers et pédales, ainsi que du sabot moteur. « Lors de ce test, nous n’avons pas vécu de situations extrêmes comme j’ai pu en rencontrer maintes fois lors de mes nombreux rallyes, commente Nicolas. Les éléments précités n’ont donc posé aucun problème. Mais lors des compétitions, l’attention et l’anticipation seront notamment portées sur ces objets. »
Il est convaincu par l’ergonomie de la machine dans le terrain, que ce soit en position assise ou debout. Et comme ses devanciers, il apprécie la finesse de la Kove 450, en comparaison notamment avec la Fantic 450 dont le team avait pu faire l’essai.
« Les commandes sont simples et précises, avec un petit bémol lors du rétrogradage des vitesses, un peu plus dur que la normale, continue Nicolas. Cet aspect, qui ne nous a pas vraiment gêné lors de l’essai, va-t-il disparaître après quelques kilomètres de rodage? À voir. »
« La maniabilité de la machine est parfaite, la moto est très joueuse et accessible. Les éléments d’origine composant les suspensions sont jugés bons. On est donc peu intervenu sur les réglages, on a juste durci un maximum la fourche pour un meilleur encaissement des gros chocs. Pour la compétition, la question du réglage de la fourche et de l’amortisseur nécessitera un travail plus approfondi en fonction du pilote, soit notamment en utilisant une huile moins fluide et/ou des ressorts plus forts. L’amortissement des chocs à grandes vitesses est à prendre en compte en compétition. Mais dans notre expérience, ces suspensions, sans être des éléments de marques prestigieuses comme Kayaba, Öhlins ou WP, font bien leur job à haute comme à basse vitesse. »
Il aime le son du moteur de cette 450 Factory. « Il a sinon les qualités de ces défauts au regard des spécialistes de la discipline. La Kove est moins puissante que la concurrence, et un pilote aguerri habitué aux motos de compétition sera peut-être insatisfait, alors que l’amateur y trouvera clairement son compte et même plus. » C’est clairement ce deuxième type d’utilisateurs qui intéresse le team Edelweiss Racing, avec une machine moins violente et qui sera d’une plus grande facilité de gestion et donc procurera une économie d’efforts lors de son usage pour toute une durée de course.
« Il faut s’imaginer piloter en milieu hostile, difficile, avec de la chaleur et pendant de longues heures, image Nicolas. Ca, c’est pour l’usage compétition. L’amateur, lui, s’en sortira mieux avec une moto de type couteau suisse. Pour l’entraînement également, l’amateur trouvera un grand avantage, parce qu’il pourra progresser plus rapidement en pilotage. »
Il conclut: « Le moteur a moins de puissance et d’élasticité dans l’utilisation des plages de vitesse que la concurrence établie. En face d’une dune cathédrale, ou de celles grandioses que l’on trouve sur le tracé du Dakar, je ne peux que conseiller avec cette moto de réfléchir à garder un plan B en tête pour contourner l’obstacle. Heureusement que ce genre de difficulté est l’apanage des rallyes extrêmes et que sur les 90% des rallyes existants, la Kove sera tout à fait adaptée en terme de puissance. »
« La question de la fiabilité est un autre point crucial en rallye-raid. Nous avons acquis cette machine, car sur le papier et dans les actes sur différentes courses, éditions du Dakar comprises, elle a déjà fait ses preuves. Il s’agit maintenant de faire notre propre expérience, ce qui devrait se faire bientôt en Afrique du Nord par le biais d’un de nos pilotes, et aussi lors de stages d’enduro au Maroc où nous proposerons cette machine. »
Pour en savoir plus, vous pouvez consulter le site web d’une des sociétés qui distribuent les modèles de rallye de Kove en Suisse romande, notre partenaire SP Racing à Moudon.
Vous pouvez aussi vous adresser à nos autres partenaires Kove dans notre Annuaire ActuMoto des pros de la moto: 3D Motos à Bretigny-sur-Morrens (VD), le Garage des Grives à Granges-Paccot (FR), Genève Moto Center à Satigny (GE) et Tricana Motorcycles à Corseaux-sur-Vevey.
Et encore quelques photos de détails de cette Kove 450 Factory, réalisées par notre photographe Stéphanie Montesinos!