La nouvelle Fireblade a bel et bien retrouvé tout son tranchant
La Super Sport japonaise fait mieux que se hisser au niveau de la concurrence dans sa version 2017. Elle reste facile à prendre en main, intuitive, confortable, tout en offrant une belle dose de punch, et surtout l’un des meilleurs rapports poids-puissance du paddock.
Avec les pleins, elle pèse le même nombre de kilos que la CBR 600 RR (qui vit sa dernière année car elle n’est pas conforme aux nouvelles normes antipollution Euro 4) du même constructeur. La toute dernière évolution de la Honda CBR 1000 RR Fireblade a retrouvé tout son tranchant. Cette Super Sport de quasi 1000 centimètres cubes offre de fait l’un des meilleurs rapports poids-puissance du marché dans ce segment. Et nous avons pu vérifier les apports de cette évolution sur le célèbre circuit de Portimao, au sud du Portugal. Avec notamment comme co-testeur rien moins que le pilote de Moto 2 suisse Dominique Aegerter.
« J’ai pu comparer avec des concurrentes, et je dois dire qu’avec la vieille Fireblade, il fallait faire plus d’effort pour la faire tourner et plus généralement pour l’emmener sur un circuit, explique Dominique Aegerter, qui vient de faire deux sessions au guidon de la nouvelle Honda. Elle donnait la sensation d’être une grosse moto. »
Selon lui, tout a changé avec le millésime 2017. « Elle est légère, agile, presque comme une 600, mais c’est une 1000. Et le moteur a fait de grands progrès. »
Beaucoup plus puissante
On rappelle que cette nouvelle Fireblade délivre une puissance maximale de 192 chevaux à presque 13000 tr/min. Le couple maximal demeure inchangé, mais il est plus fort sur une bonne partie de la plage des régimes de rotation du quatre cylindres en ligne. Pour 196 kilos avec les pleins et l’ABS. Et une pleine conformité aux normes antipollution et antibruit Euro 4, qui entrent en vigueur cette année, et qui sont pourtant plus strictes que les précédentes.
L’Autodromo de Algarve, l’autre nom, officiel, du circuit de Portimao, est composé d’une belle ligne droite et d’un nombre impressionnant de montées et de descentes, souvent combinées avec des virages dont ne voit pas la sortie. L’agilité de la moto, le ressenti qu’elle donne à son pilote sont ici au moins aussi importants que la puissance qu’elle délivre.
Et justement, s’il est une parole qui peut caractériser la CBR 1000 RR 2017, c’est la facilité. Le même mot que celui que l’on a utilisé pour qualifier la CBR 1000 RR 2012-2016. Et presque toutes les générations précédentes, qui remontent à l’année 1992.
Retour aux origines
Mais au fil des années, la Fireblade est devenue plus cossue, plus lourde. Alors que le concept originel était de proposer une machine légère, dont la puissance n’était pas la plus importante du marché, mais dotée de l’agilité d’une 600 et d’un moteur de 1000.
Déjà en montant à bord moteur arrêté, on remarque que l’ergonomie est bien étudiée. Le soussigné mesure 1m70 et possède de courtes jambes. Il peut cependant facilement toucher terre, grâce à l’étroitesse de la selle près du réservoir. La largeur donnée par le quatre-cylindre en ligne permet aux genoux de bien se placer en renfort du reste du corps pour tenir la moto. Le guidon est bien sûr en position sportive, mais ce n’est pas trop extrême. Et il y a de la place pour ceux qui ont des jambes nettement plus longues.
En roulant, c’est pareil, on se sent tout de suite à son aise. Le contrôle est facile, la moto va exactement où l’on veut et l’on peut facilement corriger sa trajectoire quand on se plante après l’un des fameux virages à l’aveugle de Portimao et que l’on arrive trop large.
Reine du feedback
Selon Freddie Spencer, ex-champion du monde, célèbre pour avoir décroché la même année la couronne en 250 cc et 500 cc, c’est parce que le châssis de la Fireblade donne un excellent feedback. « Fast » Freddie nous a servi d’ouvreur, nous montrant si nécessaire les bonnes trajectoires. Mais c’est un pilote d’une rapidité redoutable quand il se met en mode attaque. Et pour lui, le feedback, c’est important. Il sait de quoi il parle, ses vieilles Honda de compétition étaient remarquablement difficiles à faire tourner.
Quant à la puissance et au couple, ils n’ont pas le côté démoniaque de la BMW S 1000 RR à mi-régime ou de la Kawasaki ZX-10 R à haut régime. Mais il y en a plus qu’assez. On déboule dans la ligne droite des stands avec un beau 270 km/h. Domi Aegerter avoue même avoir frôlé les 300 km/h! Et dans les enchaînements de virages montant-descendant, si l’on ouvre la poignée des gaz en grand sur une bosse… eh bien la moto lève le nez, tout simplement. Mais l’électronique veille au grain et coupe immédiatement cet accès d’exubérance.
C’est la première Honda sportive à adopter un contrôle de traction, un frein moteur ajustable, une courbe de puissance paramétrable et des modes de pilotage. Il était temps, dira-t-on. Certes, mais là, c’est proche de la perfection.
Le contrôle de traction posé sur 2 (il y a 9 degrés possibles, 1 étant le moins intrusif, et on peut désactiver) permet de délester la roue avant lors de fortes accélérations. Mais même avec la Fireblade penchée, tout reste sous contrôle. Ce que les ingénieurs Honda appellent « the next generation of total control ». En référence au slogan qui est né avec la première Fireblade (« Total Control », autrement dit, « contrôle total »).
Next Generation Total Control
On a droit à trois modes de pilotage prédéfinis: le premier correspond à un usage sur circuit (s’il ne pleut pas), le second est pour les routes où l’on roule de manière animée, et le dernier est plus calme. A chaque fois, on a des valeurs différentes pour le contrôle de traction et pour le frein moteur. Et il reste deux modes dits « user » (utilisateur), où l’on peut régler manuellement chacun de ces paramètres (puissance, contrôle de traction et frein moteur).
Nous avons utilisé la moto en version standard sur des pneus de route (adaptés à la piste), des Bridgestone S21. Il y a déjà de quoi faire, même si les freinages très appuyés peuvent faire gigoter l’arrière et faire intervenir l’ABS de manière intrusive. Ce dernier n’est par ailleurs ni réglable ni déconnectable. La manie de la sécurité chère à Honda.
Pour compenser, on peut mieux décomposer l’action de freinage avant l’entrée en virage, et régler les suspensions avec des outils idoines pour obtenir par exemple un peu plus de latitude de la part de la roue arrière, ce que nous n’avons pas fait, et ce que nous n’avons pas non plus demandé aux techniciens Honda.
Place à la SP
Il nous tardait d’essayer la CBR 1000 RR SP, livrée d’origine avec des pneus Bridgestone S10R plus adaptés encore à la piste. Les exemplaires présents à Portimao étaient même dotés de bons slicks. La SP porte du bleu dans sa livrée tricolore et qui est équipée de série avec des freins plus premium. Elle a aussi des jantes dorées et surtout des suspensions de marque Öhlins semi-actives. Elles se règlent comme le reste, via les boutons de sélection sur le comodo gauche et le nouveau tableau de bord en couleur – très lisible et très clair.
Comme pour les paramètres agissant sur le moteur, il y a trois modes de base automatiques. L’un d’entre eux correspond à un usage sur piste, et les deux autres, par contre, à une utilisation sur la route. Dans ces modes, la moto ajuste elle-même ses réglages au fur et à mesure, presque en temps réel. Jusqu’ici, c’est simple.
Mais les choses se corsent lorsque l’on va un peu plus dans les détails. Il y a aussi trois modes « manuels ». La CBR adopte alors un réglage fixe. Le premier est toujours le plus adapté pour le circuit. Et enfin il est possible de sélectionner de manière plus fine encore les caractéristiques d’amortissement en fonction des phases de pilotage de la Fireblade.
On règle le comportement de la moto
On oublie les termes que les amateurs de piste un peu expérimentés connaissent bien, comme la précharge, la compression et la détente, à basse ou haute vitesse. Non, le « next generation total control » vous demande plutôt ce que vous voulez en terme de comportement lors du freinage, lors du passage en virage ou lors de l’accélération.
Et l’on ajuste cela de manière fine, par des moins ou des plus. Jusqu’à ce que l’on ait trouvé le réglage qui matérialise le meilleur compromis pour un circuit donné, pour votre manière de piloter et pour les conditions du jour (météo, pneus, etc.).
Réglages fins et personnalisés
Nous avons eu droit à une session de roulage un peu plus longue que les autres (45 mn au lieu de 20). Les pilotes pouvaient en effet rentrer au stand dès qu’ils voulaient changer quelque chose. Une armada d’ingénieurs et techniciens, plus Freddie Spencer et son collègue héros du Tourist Trophy Steve Platter étaient là pour réaliser nos désirs… pour autant qu’ils soient cohérents. On ne peut pas tout avoir à tout moment et partout.
Chaque changement, aussi petit soit-il, était perceptible lors du tour qui suivait. Ce qui en dit long sur le feedback et la précision offerte par la nouvelle Fireblade.
Pour notre part, nous nous sommes bornés à pointer du doigt le fait que l’arrière de la moto gigotait encore un peu (moins que la CBR 1000 RR de base) lors de freinages appuyés au bout de la ligne droite. Quelques réglages par bouton-pressoir plus tard, le problème était réglé. Ah, et nous avons aussi pu augmenter la sensibilité du Quickshifter. Ce dernier se double d’un auto-blipper – on peut passer les rapports sans débrayer aussi bien en montant qu’en descendant . Et il est de série sur la SP – en option sur la RR.
Plus besoin d’embrayage
Ca n’a l’air de rien, mais c’est essentiel pour adopter un style de pilotage fluide. Comme nous l’a conseillé « Fast » Freddie Spencer, le meilleur professeur au monde pour ce genre de chose.
On note encore que les prix pré-annoncés pour ces deux motos sont très corrects (environ 19000 francs pour la RR, et environ 24000 pour la RR SP). Et il faut souligner que la qualité de construction et de finition est exempte du moindre reproche.
« La RR de base est parfaite pour le pilote amateur », commente pour sa part Dominique Aegerter. Il a pu régler la SP aux petits oignons pour son style de pilotage lors de la dernière session sur le circuit de Portimao. « La SP, elle, est une bonne base pour la course, continue-t-il Je suis curieux de voir ce qu’elle donnera une fois transformée en vraie moto de compétition, avec des pièces en composite, un tuning du moteur etc. »
Un peu comme la CBR 1000 RR SP-2, une série spéciale dont la production vient à peine de commencer. Une moto de course homologuée pour la route. Avec une partie haute du moteur qui est modifiée pour plus de performances, notamment.
Galerie photo: Honda CBR 1000 RR et 1000 RR SP
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