L’avion de chasse BMW, la S 1000 XR, fait une petite cure
Nous avons pu tester la version 2020 de la sport-tourer haute de la marque allemande. Les efforts faits pour réduire le poids donnent un comportement encore plus joueur que précédemment. Et les équipements de bord, de série ou optionnels, rendent l’expérience encore plus facile. Restent la chaleur dégagée par le moteur, et une selle un peu mince pour les fessiers délicats.
C’est une sportive sur des échasses. Chez BMW, la S 1000 XR est une moto que l’on pourrait classer dans le segment des sport-tourers. Ou, si l’on s’en réfère au néologisme créé par le constructeur allemand, celui des motos de type « Adventure Sport ».
En résumé, un trail (très) sportif avec un moteur issu plus ou moins directement d’une Superbike, la S 1000 RR, des roues de 17 pouces et des suspensions à longs (mais pas trop) débattements. Et la S 1000 XR est proposée cette année dans un nouvelle version 2020, déjà compatible avec les futures normes anti-pollution Euro 5, mais pas seulement.
Nous avons pu tester une moto aimablement prêtée par BMW Suisse. Il faut dire qu’il n’y a plus beaucoup de machines disponibles dans le stock suisse, depuis son apparition en ce début d’année, les clients s’étant rués sur cet avion de chasse dans sa nouvelle déclinaison, et ce malgré le semi-confinement imposé pour lutter contre la pandémie de nouveau coronavirus.
Comme de coutume chez le constructeur allemand, entre le prix de la moto standard (un peu plus de 17000 frs) et celui de la version testée (près de 24000 frs), équipée de toutes sortes d’options, il y a un gouffre. Il est sans doute possible de prendre autant de plaisir en roulant sur une S 1000 XR standard. Mais cela signifie entre autres faire l’impasse sur la jolie couleur Racing Red de notre modèle de test, sur les poignées chauffantes, l’ajustage automatique de la précharge arrière, sur les phares de virage, la béquille centrale, les phares de virage et surtout le tempomat BMW ajustable, toujours très efficace. Ce dernier est précieux sur une telle bête de course (165 chevaux, 114 Nm).
Cette nouvelle version est subtilement différente, visuellement parlant. On n’arrive pas à pointer du doigt une divergence frappante, à part le pot d’échappement, un peu plus orienté vers le haut et un peu plus fin. Mais l’impression d’ensemble est bel et bien d’avoir sous les yeux une moto plus fine.
L’ergonomie est excellente. J’arrive à poser l’avant des deux pieds à terre à l’arrêt (je mesure 1m70), et le guidon est placé là où il faut pour que la position soit légèrement sportive sans être fatigante. La béquille centrale est simple et facile à actionner. Même chose pour la latérale, à un détail près: elle est un peu courte et il faut pas mal redresser la moto, qui pèse son poids, pour la mettre droit. L’exercice n’est pas impossible et ne demande pas une force immense, mais on doit faire un effort, qui provient aussi du fait que le moteur quatre-cylindre en ligne est relativement haute et prend de la place en largeur.
Il est vrai que ce trait de caractère est moins présent sur ce millésime 2020 que sur les précédents. Et que cette nouvelle version a perdu 3 kilos par rapport à la S 1000 XR datant de 2017, année où le dernier changement eut lieu, voire même dix si l’on compare des motos pleinement équipées.
On a dit que l’ergonomie était excellente, et c’est vrai aussi en roulant. Les jambes du sous-signé ne sont que peu repliées et le siège procure un bon appui lombaire. Par contre, pour ce qui est du confort, il y a encore quelques points d’amélioration possibles. La selle très sportive est aussi très mince, et même dans le réglage Road du pilotage électronique des suspensions, censé être plus confortable, on sent parfois désagréablement les brusques irrégularité du bitume. Surtout dans le guidon. Au bout de quelque 200 kilomètres, on se prend aussi à devoir sans arrêt changer de position, les fessiers commençant à en avoir marre de la selle « baquet ». On n’a pas ce problème, présent surtout sur autoroute, si l’on peut rouler de manière plus active, avec des changements de trajectoires, des accélérations et des freinages. Et le rayon des accessoires propose une selle confort, bien évidemment, contre un peu plus d’argent.
Mais il faut aussi reconnaître que la position de conduite est bien plus relaxante que celle d’une vraie sportive, et même que celle d’une naked classique. Le bras de levier du guidon est légèrement meilleur, tourner demande moins d’effort, et les jambes se fatiguent beaucoup moins vite.
On constate également qu’un travail utile a été mené sur la démultiplication et sur les courbes de puissance et de couple. A vitesse soutenue sur l’autoroute, il y a moins de vibrations gênantes de haute fréquence, et c’est le cas aussi au ralenti, et en roulant entre 50 et 80 km/h.
La promenade en ville est facile, la moto étant maniable et agile, et le gros moteur très souple. Mais son grondement continu peut énerver au bout d’un long moment. Et la chaleur dégagée par cette usine à muscles devient un peu fastidieuse si l’on passe ses trajets dans les bouchons.
Pour ce qui est du moteur, justement, il a deux visages. Et non, ce n’est pas un cliché. Placide (sauf pour ce qui est de sa sonorité et de la chaleur dégagée) à bas régimes, bondissant dès les mi-régimes. Il est moins brusque que la première version de ce quatre-cylindre en ligne refroidi par liquide, tel qu’il a été utilisé dans la sportive S 1000 RR, l’accélération est plus progressive. Mais elle est malgré tout impressionnante. Il y a bien sûr moins de couple tout en bas que par exemple un bicylindre, ou ce même moteur doté de la technique dite ShiftCam de BMW, sur la S 1000 RR dernier modèle (lire notre test), qui adopte deux profils de cames différents selon les plages de régimes. Le quatre-pattes de la XR est dépourvu du ShiftCam, et cela fait qu’il faut ouvrir en relativement grand la poignée des gaz si l’on veut effectuer un départ foudroyant.
Il y a pas mal d’allonge, moins que sur une SuperSport ou une HyperSport, avec moins de puissance tout en haut, mais largement assez pour un usage routier ou autoroutier. Dire le contraire, et pour autant qu’on n’aille pas rouler sur un circuit, n’est dans ce cadre-là que marketing.
Toute cette puissance sauvage est tenue en laisse par les aides électroniques nombreuses qui sont fournies avec la moto déjà en variante standard. Il y a bien évidemment un antipatinage, appelé DTC, pour Dynamic Traction Control. Son degré d’intervention varie selon le mode de pilotage choisi, par la grâce de l’accélérateur électronique, et en fonction des informations collectées en temps réel par un contrôleur et par une unité de mesures inertielles détectant les déplacements et les changements de vitesse de la moto sur plusieurs axes spatiaux. Dit comme ça, c’est compliqué. Mais en sachant qu’on a à disposition les modes Rain (pluie), Road, Dynamic, et Dynamic Pro, on comprend aisément qu’en Rain le DTC est plus interventionniste qu’en Dynamic ou en Dynamic Pro. Et dans tous les cas le système tient compte de l’inclinaison de la moto dans ses interventions. C’est plus évident encore lorsqu’il s’agit de l’ABS Pro, le système d’anti-blocage au freinage. D’ordinaire, quand vous faites un freinage panique (ou d’urgence) en plein virage, les freins redressent la moto et vous partez tout droit. L’ABS dit de virage combat ce phénomène en modulant la pression des freins pour que vous puissiez continuer à suivre votre trajectoire tout en freinant fortement.
Les freins sont par ailleurs irréprochables. Il y a suffisamment de puissance dans toutes les circonstances, c’est progressif à souhait, cela peut devenir très mordant si l’on actionne rapidement le levier du frein avant (dans ce cas le système fait aussi jouer l’étrier du frein arrière pour stabiliser la moto), et la dosabilité est parfaite. Et ces freins sont endurants et ne varient pas dans leur action, du moins pas sur route (nous n’avons pas roulé sur circuit).
La S 1000 XR a aussi un anti-wheelie, et un système de contrôle du couple moteur, le MSR, qui agit comme un anti-dribble électronique et maintiendra la roue arrière en ligne et collée au sol lorsque vous effectuerez des freinages de cochon et des rétrogradages de même. Mais vous pouvez si vous le voulez déconnecter complètement le DTC, pa rle biais d’un bouton sur le commodo gauche. Ou/et aussi choisir le mode de pilotage Dynamic Pro qui autorise un certain degré de levage de la roue avant (on a testé, discrètement, sur une petite route déserte). La sécurité par le biais de l’électronique n’empêche donc pas à tout prix les velleités de stunt du pilote.
De manière générale, la S 1000 XR est une véritable arme dans les virages, quels qu’ils soient, resserrés, larges, constants ou pas, rapides ou lents. Les changements de direction restent très rapides si nécessaire, même si la machine pèse plus de 230 kilos avec les pleins. Sa géométrie sportive malgré le plus grand débattement de suspensions est ici un atout. Et l’on peut choisir de porter le poids du corps vers l’avant, pour charger la roue tout devant, ou vers le milieu, pour rouler de manière plus décontractée. Un éventuel passager ne sera à priori pas inconfortable, il pourra s’accrocher à des poignées de maintien ergonomiques (très utile au vu des accélérations de la S 1000 XR). L’espace dont il disposera sur la partie arrière de la selle n’est toutefois pas des plus spacieux. On n’est pas sur une GT!
On voit qu’on n’est pas sur un tourer grand luxe également pour ce qui est de la protection aérodynamique. Il y a un pare-brise, que l’on peut faire passer d’une seule main en roulant de la position basse à la position haute, et vice-versa. Réglé au plus haut, il enlève une part non négligeable de la pression d’air sur le torse et le casque du pilote. Mais il y a encore des remous, et les épaules sont exposées. On signale que notre S 1000 XR de test était équipée de protège-mains, en option.
Cette BMW est encore fournie avec un pilotage électronique des suspensions, baptisé ESA chez BMW. Il ajuste automatiquement l’amortissement en fonction des infos collectées par les capteurs de la moto en roulant. On peut régler par bouton le degré de précharge de l’amortisseur arrière, pour l’adapter au chargement (pilote seul, pilote avec bagages, pilote avec passager…). Une option installée sur notre machine de test permet d’avoir un réglage éventuellement automatique de cette précharge, et de choisir entre deux lois d’amortissement, Road ou Dynamic. La première étant plus axée sur le confort, la seconde sur la rigueur et la sportivité. Et cela fonctionne très bien! On pourrait juste reprocher de temps en temps aux suspensions de réagir avec un peu de raideur, même en mode Road, lorsque l’on passe sur des irrégularités prononcées mais isolées du bitume: type une vague perpendiculaire au sens de votre marche, au profil assez raide. Dans ces cas, le naturel plus sportif que touring de la moto refait surface et vous transmet de désagréables secousses dans le guidon.
Vous avez aussi de série une aide au démarrage en côte. Si vous serrez brusquement les freins à l’arrêt, ceux-ci restent serrés quelques secondes, vous laissant le temps de changer de position avec les mains pour actionner la poignée des gaz. Une sorte de frein à main automatique. Que l’on peut heureusement désactiver en tripatouillant dans les menus du large tableau de bord en couleur très lisible – question de préférence personnelle.
Derniers points dans la liste des équipements standards pour le prix de base, il y a le pavé TFT en couleur déjà évoqué, qui vous propose plusieurs écrans et plusieurs visualisations des paramètres de votre moto. L’une d’elle, baptisée « Sport », vous montre en direct la force d’accélération ou celle de freinage appliquée par vos soins, et l’angle d’inclinaison atteint à gauche ou à droite. L’écran garde en mémoire et affiche l’angle maximum avant une remise à zéro des paramètres du voyage ou la coupure du contact. Cela devient vite un jeu, et l’on se surprend à incliner de plus en plus la S 1000 XR dans les virages… sans autre commentaire. Une grosse molette sur le commodo gauche, appelée multi-contrôleur, permet de naviguer dans les menus de manière intuitive. Quelques fonctions sont cependant aussi assignées directement à des boutons séparés, comme le tempomat (une option) ajustable, le réglage des poignées chauffantes, le réglage de l’amortissement de suspensions…
En résumé, c’est logique, facile et rapide. On voit ici tout le bénéfice de l’expérience acquise par BMW. Seul petit bémol à mon sens: la connectivité avec les smartphones, mise en avant par la marque allemande comme argument de vente, car incluse dans les équipements de série sur ce modèle, ne fonctionne correctement qu’avec un casque et un intercom agréés, donc portant la marque BMW Motorrad. On peut tenter sa chance avec un autre équipement, mais rien n’est garanti. Nous avons essayé avec un appareil Senna, que la moto n’a jamais pu détecter.
On apprécie beaucoup la présence d’un petit compartiment sur le sommet du réservoir d’essence, idéal pour glisser un ticket de péage autoroutier, par exemple. Et celle de valves de gonflage des pneumatiques coudées, ce qui facilite grandement le gonflage. Et la mesure de la pression – même si notre moto de test était fournie avec un système de contrôle électronique de la pression des pneus. Oui, c’est bien sûr une option payante.
De nuit, les phares à LED, puissants, éclairent assez loin et assez large. Les phares de virage, une option payante présente sur notre moto, sont diablement utiles dans les virages.
Un dernier mot sur l’autonomie. Les 20 litres d’essence présents dans le réservoir autorisent des étapes allant de 270 à plus de 300 km. Bien sûr, si l’on ouvre tout le temps en grand la poignée des gaz, on pourra parcourir moins de kilomètres. La consommation lors de notre test a atteint un peu plus de 6,45 l/100 km.
Bonjour
Bravo pour la qualité de vos essais.
Changeant très souvent de moto(surtout des BMW),je dois dire que vos essais sont trés bien faits pour avoir un avis
Merci