Essai – la Honda CRF 300 Rally dans le terrain
Moteur plus puissant, plus coupleux, cadre plus léger, géometrie changée… nous avons voulu voir ce que ça donnait avec des vrais pneus d’enduro, en France voisine, et lors du Hard Défitour 2021. Aussi (un peu) sur la route.
Elle frappe tout de suite les yeux des passants, la CRF 300 Rally. Ce petit trail baroudeur signé Honda est disponible en une version « standard », la CRF 300 L, et en une version censée être plus aventureuse, la Rally, avec un plus gros réservoir et un tête de fourche façon rallye, justement (lire notre présentation).
C’est cette dernière que nous avons pu essayer durant un peu plus d’une semaine, grâce à Honda Suisse. Histoire de voir aussi ce qu’apportaient par rapport aux CRF 250 L et Rally précédentes, avec le nouveau moteur, le nouveau cadre et les changements apportés à l’ergonomie et à la géométrie de ces motos.
Mais plutôt que de nous contenter de rouler sur l’asphalte des routes suisses, nous avons demandé à Honda Suisse d’équiper leur moto avec de vrais pneus à crampon, des Bridgestone Battlecross E50 (au lieu des IRC Trails GP-22 d’origine).
Et avons décidé d’aller voir ce que ça donnait vraiment dans le terrain. D’abord lors d’une balade française au départ de Genève nous conduisant sur une petite route forestière française au pied du contrefort sud de la chaîne du Jura. Puis lors d’un week-end en Auvergne, à l’occasion de l’édition 2021 du Hard Défitour. Nous y reviendrons plus loin.
Les premiers kilomètres sur le bitume montrent que cette moto est toujours d’une grande facilité d’usage. On monte en selle, on tourne le contacteur avec la clé, on relâche l’embrayage, par ailleurs d’une grande douceur et demandant peu de force à la main du pilote, on ouvre la poignée des gaz, et c’est parti.
Bien sûr, les pneus d’enduro au gonflage adéquat pour l’emploi en offroad transmettent une impression bizarre sur la route, faisant osciller la moto au freinage et à l’accélération, mais aussi lorsque les suspensions absorbent des irrégularités. Cela dit, la partie-cycle est saine et prévisible, la fourche inversée et l’amortisseur central étant bien accordés, et les freins offrant ce qu’il faut de contrôle. Et puis les 153 kilos avec les pleins du modèle 2021 (plus léger que la 250!) font que tout reste dans les clous.
Sur une piste légèrement gravillonneuse, parsemée de flaques qui témoignent d’une pluie récente, on a une sensation tout d’abord un peu similaire venant du train avant, qui bouge de manière souple dans les virages et les changements de cap. Mais on se sent déjà plus dans son élément.
Et au fil des kilomètres, en arrivant sur une route en terre, avec des copeaux de bois (exploitation forestière), des petits cailloux et des reste de branchages, et même un peu de boue assez compacte, la CFR 300 Rally se fait de plus en plus rassurante. Les pneus passent bien la traction au sol, les suspensions, très souples, amortissent les cailloux et les changements de niveau avec une rigueur acceptable et un bon confort, et le moteur refroidi par liquide se révéler joueur malgré sa cylindrée modeste.
L’augmentation de la taille du petit monocylindre ne se remarque pas tellement sur la fiche technique, où les valeurs déclarées de puissance et de couple maximaux progressent, mais pas dans des proportions gigantesques. Par contre, on sent que la moto est plus réactive en termes d’accélérations. Et il y a déjà une poussée acceptable dans les bas et mi-régimes.
Après ce premier contact d’une quarantaine de kilomètres juste de l’autre côté de la frontière, il est temps de se frotter à plus sérieux: le Hard Défitour français, soit plus de 350 km en une journée, à quelque 80% en tout-terrain, dans le massif central. Juste à la frontière sud-ouest de l’Auvergne, dans une région bordant l’Aquitaine au sud et le département de la Corrèze à l’ouest.
Le « HDT », durant la première journée de cette épreuve non chronométrée, où il faut juste suivre une trace GPS mais avec tout de même une limite de temps en fin de journée, ce sont des sentiers en forêt, la plupart du temps, avec de beaux dénivelés, tant en descente qu’en montée, des racines à loisir, des cailloux plus ou moins gros, de la terre plus ou moins grasse, des franchissements de (petites) rivières, de belles ornières, un peu de sable, et selon la météo plus ou moins de boue. En tout, pour cette édition 2021, quelque 360 km à parcourir en quelque 13 heures.
Comme je n’ai pas eu le temps matériellement d’installer un support de GPS sur la petite Honda, je me fie à mon smartphone glissé dans une attache de bras, façon coureur à pied (mais au serrage un peu trop étroit pour ma manche de veste de moto). Et surtout aux GPS des trois GS que je vais suivre. Hélas, les deux premières vont devoir abandonner dans la première montée, et la troisième à la pause de midi. Je n’arriverai donc pas à faire plus de la moitié de la trace fournie par les organisateurs.
Il reste que sur ces plus de 100 km de tout-terrain (plus un peu de route pour les liaisons entre les sentiers), la CRF 300 Rally s’est montrée rassurante et facile à exploiter, que ce soit debout ou assis. Dressé sur les cale-pieds bien larges, on place naturellement ses jambes contre les flancs du réservoir d’essence et les caches en plastique, le guidon étant bien placé quand on doit se pencher en avant pour attaquer une grimpette. Le réservoir d’essence, plus volumineux que sur la CRF 300 L (non Rally), ne gêne pas le positionnement du corps et des jambes.
De même en descente, et l’on dirige facilement la moto quand on doit contourner des obstacles au sol. S’il faut se glisser sous une branche, c’est aussi possible.
La fine roue avant de 21 pouces permet de surmonter un grand nombre d’irrégularités au sol. On relève au passage que les jantes sont des unités Excel, gage de qualité et de durabilité. Il faut un peu d’élan et un bon positionnement pour obtenir la traction désirée sur l’arrière de la moto. Au moins n’a-t-on pas à déconnecter un contrôle de traction, qui de toutes façons ne servirait pas à grand chose ici.
Le fait de pouvoir désactiver l’action de l’ABS sur la roue arrière est une aide quand on doit faire glisser le pneu postérieur pour passer dans des endroits délicats. L’anti-blocage reste par contre actif sur l’avant, ce qui n’est pas plus mal pour le pilote pas trop expérimenté que je suis, dans ce genre de conditions de roulage. Cet ABS, simple dans son fonctionnement, est efficace en conduite non sportive. C’est tout ce qu’on lui demande.
Seule la précharge de l’amortisseur arrière est ajustable (avec des outils). Le sous-signé pèse un peu moins de 90 kg. Un pilote encore plus lourd fait s’affaisser encore plus la selle, et dans ce cas il peut en effet s’avérer utile de remonter le ressort arrière.
Dans la pénombre des sous-bois comme en plein soleil, le tableau de bord à cristaux liquides s’est avéré pleinement lisible, même si les indications noires sur fond gris ne sont pas des plus lumineuses. Mais on arrive bien à voir le régime du moteur, ou du moins le nombre de rectangles affichés (le chiffre effectif est un peu trop petit), le rapport de vitesses sélectionné, l’état de la jauge d’essence et bien sûr la vitesse. Les autres indications (compteur kilométrique, partiels, heure…) sont encore déchiffrables, mais ça demande un peu plus de concentration. On voit que Honda a joué les économies d’échelle en dotant sa CRF 300 d’un écran de forme horizontale qui aurait aussi bien pu être installé sur une naked ou une sportive. Il aurait peut-être été plus judicieux, au vu du type de moto, de le placer de manière verticale. Mais on pinaille.
Il y a par contre quelque chose à dire sur l’utilisation des deux classiques boutons postés sur le bord gauche de cet écran, qui ne sont pas des plus évidents à manipuler avec des gants. Et les indications disant quel bouton permet de changer d’affichage et quel bouton permet de régler cet affichage (remise à zéro du partiel, réglage de l’heure) sont à peu près illisibles en noir sur fond noir. Il faut juste essayer et voir ce qui se passe, ce qui n’est en soi pas problématique. Et la remise à zéro est intuitive.
Nous n’avons pas vraiment pu tester le phare avant en conditions nocturnes, mais il nous semble correct dans la pénombre de la forêt. Quant à la selle, elle est du genre ferme, mais sans pour autant être trop mince. Et les rétroviseurs sont bien conçus; leur vision n’est pas brouillée par les quelques vibrations du moteur, et ils offrent un champ de vision suffisant, avec de vraies possibilités de réglage.
Nous avons pu au contraire tester la solidité de la moto lors d’une chute. Elle s’est couchée sur le côté dans une montée, et n’a souffert que de petite griffures sur les flancs, sans levier ni pare-main abîmé. Les 153 kg avec les pleins de la CRF Rally font qu’elle est relativement facile à relever.
La grande souplesse d’action des suspensions dans leur ensemble peuvent poser un problème dans le terrain: si l’on monte en position debout en prenant appui sur un cale-pied, il faut faire attention à ne pas prendre un grand élan, car on peut risquer, selon la nature et la géométrie du terrain, de faire basculer la moto du côté opposé du fait de l’effet ressort! Au moins la béquille latérale a-t-elle exactement la taille, l’inclinaison et la terminaison qui fait qu’elle est utilisable sans souci sur l’asphalte comme en tout-terrain.
Nous n’avons pas pu mesurer de manière très scientifique la consommation d’essence, qui est faible. Et la Rally offre quelques litres de plus que la 300 L, ce qui fait que l’on peut envisager de longues étapes sans devoir rajouter du carburant.
On apprécie enfin grandement la présence d’un petit vide-poche verrouillable (!) sur le côté arrière gauche de la moto. Où se trouve d’origine une petite trousse à outil, et où l’on par exemple encore ranger une carte grise protégée de l’eau par une housse. Nous n’avons pas testé sous la pluie.
Cette CRF 300 Rally est en définitive une moto attachante et facile, qui a de réelles capacités de franchissement. Son seul petit défaut est à notre avis de coûter plus de 1000 francs de plus que sa soeur au masque de phare plus minimaliste et au réservoir d’essence plus petit, la CRF 300 L!
Pour plus d’infos sur la gamme Honda, vous pouvez consulter le site de Honda Suisse. Ou vous adresser à nos partenaires de l’Annuaire des professionnels de la moto: Moto Rush à Genève, Moto Loisirs et Michel Moto à Lausanne, le Garage J.-J. Cherix à Bex (VD) et Zufferey Motos à Martigny.
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